Au fond de lui, Amadou Soumahoro n’est sûrement pas fier des conditions de sa désignation, vendredi dernier, comme président de l’Assemblée parlementaire de la francophonie (APF). Intimement,il sait qu’il est le plus illégitime des présidents qui se sont succédé à la tête de cette organisation.
Cette illégitimité va suivre le député de Séguéla jusqu’à la fin de sa présence au sein de l’APF. Partout, et à chaque occasion, il aura intimement une gêne et un sentiment de redevabilité vis-à-vis des parlementaires francophones qui ont participé à la combine dont il a bénéficié. Parfois, lorsqu’il les verra en aparté, il s’imaginera qu’ils sont en train derire de lui et de tout le spectacle qu’il a montré de Ouagadougou à Abidjan, en passant par l’assemblée régionale Afrique de Rabat, s’égosillant dans les couloirs, agaçant les délégués avec ses caprices, faisant dépenser autant d’argent au contribuable de Côte d’Ivoire, un pays si pauvre,pour un poste aussi insignifiant.
De mémoire d’observateur de la vie politique ivoirienne, l’ancien maire de Séguéla a vécu bien de situations non honorables durant la dernière décennie. On se souvient notamment de sa défaite aux élections municipales de 2013 face à l’indépendant Diomandé Lassina. On n’oublie pas non plus son rêve brisé à l’issue du 3e congrès ordinaire du RDR en septembre 2017. Contre toute attente, l’intérimaire de longue date qu’il était n’a pas été confirmé au poste de secrétaire général du parti au pouvoir, Kandia Camara lui ayant été préféré. Cependant, faute d’honneur, l’ancien ministre du Commerce est sorti de ces évènements avec plus de respect que l’arrangement qui vient de lui attribuer le titre de président de l’APF. Car, aux yeux de l’opinion nationale et internationale, le choix porté sur lui dans des conditions aussi calamiteuses que son élection à la tête du Parlement ivoirien, au mépris des textes et des règles de l’APF, fait définitivement de lui le symbole de l’anti-démocratie.
SORO, MERCI POUR LE BON COMBAT
Ce qui représente une réelle victoire pour Guillaume Soro dans ce dossier. A travers son combat, le député de Ferké a permis au monde entier de découvrir le vrai visage des Parlements et des parlementaires francophones. Il a mis à nu à quel point ces représentants des peuples sont inféodés au pouvoir exécutif, et faibles devant des prébendes. Grâce au combat de Guillaume Soro, on a tous vu comment des personnalités jusque-là aussi respectables en Afrique et dans le reste du monde, pouvaient se compromettre aussi facilement, en acceptant d’être les complices et les auteurs de l’injustice ayant écarté la candidature de Guillaume Soro premier vice-président sortant de l’APF, pour ne retenir que celle d’Amadou Soumahoro qui n’avait pourtant jamais siégé au sein d’une instance de l’APF. L’histoire retiendra surtout la honteuse image des Moustapha Niasse chef du Parlement sénégalais, et autres députés africains venus cautionner cet arbitraire à Abidjan.
Le combat de Guillaume Soro aura enfin permis de connaître, pour de bon, Alassane Ouattara, soutien actif de l’ombre d’Amadou Soumahoro. En suspendant ses tournées à l’intérieur du pays pour aller mener cette bataille de l’APF, l’ex-PAN ivoirien, qui vise le fauteuil présidentiel en Côte d’Ivoire, n’avait évidemment pas l’intention de faire de la présidence de l’APF une fixation. L’ancien SG de la Fesci a certainement voulu prendre à témoin l’opinion sur la manière dont le pouvoir d’Abidjan se serait comporté face à un Ivoirien prédestiné à ce poste. Malgré l’adversité politique, Ouattara aurait-il eu la même hauteur et la même sagesse que ses prédécesseurs Konan Bédié ou Laurent Gbagbo ont démontréesdevant pareille situation ? Se serait-il, au contraire, laissé guider par son éternel égo en descendant encore dans l’arène de l’APF contre son ‘’fils’’ Soro ? Aurait-il pris le risque de sortir très petit de cette compétition ? Après avoir suivi ces palabres inter-Ivoiriens qui ont humilié la Côte d’Ivoire et l’APF, le peuple ivoiriena les réponses à ces questions. Tout comme il sait mieux le long chemin qu’il nous reste à parcourir pour voir naître des Parlements francophones véritablement indépendants. Ce combat était finalement assez utile pour la postérité.
Cissé Sindou