Interview/Coronavirus : «Le risque est réel en Côte d’Ivoire, les précautions à prendre… » (DG de l’INHP)





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La Côte d’Ivoire, comme tous les autres pays du monde, a activité son dispositif de riposte pour prévenir l’arrivée sur son sol de l’épidémie du coronavirus, qui sévit depuis un peu plus d’un mois en Chine. Lors d’une interview accordée à l’AIP, le directeur général de l’Institut national d’hygiène publique (INHP), Joseph Bénié Bi Vroh, donne des détails sur les dispositions prises par la Côte d’Ivoire, et appelle à la vigilance. Entretien.  

AIP : Monsieur le directeur général, l’épidémie du Coronavirus s’est déclarée depuis quelques semaines en Chine. La Côte d’Ivoire étant très éloignée de la Chine, peut-on dire que nous sommes à l’abri d’une éventuelle survenue de la maladie ici ?

Joseph Bénié Bi Vroh : Nous  sommes loin de la Chine mais nous sommes aussi proches de la Chine par les canaux de transport, de communication. Vu les mouvements des populations aussi bien au niveau commercial que touristiques, c’est sûr qu’il y a un risque pour tous les autres pays. Depuis que l’épidémie est survenue en Chine, en 21 jours, tous les autres continents ont été atteints bien sûr sans l’Afrique pour l’instant, mais il y a un risque qui est réel. Du fait qu’aujourd’hui le monde est un village interplanétaire et il y a un brassage important de la population venant de toute part. Ainsi, donc il existe un risque réel en Côte d’Ivoire.

AIP : Et quelles dispositions sont prises ou sont en train d’être prises pour prévenir une éventuelle entrée de la maladie en Côte d’Ivoire ?

Dès que l’épidémie a été déclarée, le gouvernement de Côte d’Ivoire n’a pas attendu qu’il ait un cas suspect pour mettre en place un dispositif.

En 2014, il y a eu l’épidémie d’Ebola avec des pays limitrophes qui étaient atteints. Nous avons dès le déclenchement de cette crise en Chine, l’Etat de Côte d’Ivoire a réactivé le dispositif de sécurisation du pays. C’est ainsi que nous avons renforcé les contrôles aux frontières, conformément aux recommandations de l’OMS dans le cadre du règlement sanitaire internationale.

A Abidjan, nous avons renforcé le contrôle. Tous les passagers qui atterrissent à Abidjan aujourd’hui, systématiquement sont contrôlés au niveau de la température. Tout le monde, même les VIP ! Nous demandons à tous les passagers de se laver les mains avec le gel hydro alcoolique, et cela est systématique. Au niveau de l’aéroport, nous avons une cellule de pandémie de telle sorte que s’il y a un cas, ce cas est transféré au niveau de la cellule. Nos dispositifs à l’aéroport permettent d’avoir une détection rapide.

AIP : Mais il n’y a pas que l’aéroport comme point d’entrée, qu’en est-il des frontières terrestres et maritimes?

Joseph Bénié Bi Vroh : Bien sûr que le contrôle se fait aussi au niveau des frontières terrestres et maritimes. Que ce soit à Pôgô au niveau de la frontière avec le Mali, à Laléraba avec le Burkina, à Noé avec le Ghana, nous leurs demandons de se laver les mains et à l’eau pour ceux qui peuvent le faire sur place.

Nous avons mis en place au niveau du service des maladies infectieuses, un dispositif pour accueillir ces cas si éventuellement il y a des cas.

D’autres dispositions vont être prises, et nous allons surtout sensibiliser les populations. Il faut que la population soit informée aux bons gestes qui se résument à se laver les mains le plus fréquemment possible à l’eau ou au savon. Deuxièmement, il faut éviter tout contact avec une personne qui présente une infection respiratoire qui peut être due à cette maladie, ou une personne qui présente une infection respiratoire. Au niveau des districts sanitaires et dans les hôpitaux, nous avons envoyé des directives qui sont en train d’être diffusées.

AIP : En quoi consistent ces consignes ?

Joseph Bénié Bi Vroh : En effet, dès qu’il y a un cas suspect, on fait un prélèvement et on l’envoie à l’Institut pasteur de Côte d’Ivoire pour des analyses.

C’est une maladie virale mais c’est une maladie qui se traite. Il n’y a pas de vaccin pour le moment. Mais la maladie peut se traiter si elle est diagnostiquée tôt et si on a pu prendre la personne en charge correctement. La littérature nous dit qu’il y a eu en Chine des centaines de personnes qui sont guéries. Donc on peut en guérir.

Quand il y a eu le cas suspect le 25 janvier, non seulement nous avons isolé le cas suspect, nous avons aussi pris le contact de tous ceux qui étaient à bord de cet avion et aujourd’hui je peux vous dire que tous les passagers se portent bien. Nous avons aussi des équipes d’intervention rapide.

AIP : Mais quels sont les signes qui peuvent permettre de détecter ou de soupçonner cette maladie chez quelqu’un ?

Joseph Bénié Bi Vroh : Il y a trois signes majeurs. Il y a la fièvre, les difficultés respiratoires et la toux. La particularité de ces signes, ils s’installent de façon brutale comme c’est de la grippe par exemple. En plus de ces trois signes, il y a ce que nous appelons le lien épidémiologique : si quelqu’un présente ces trois signes et qu’il vient de la Chine, c’est un cas suspect. C’est un cas fortement suspect. S’il vient de la Chine, c’est un élément important qui permet d’aller vers un diagnostic. Il faut que je précise encore, les gens qui arrivent de la Chine sont plus à risque ceux qui sont ici.

AIP : Que faire devant un cas qu’on pense suspect ? Quelle attitude tenir ?

Joseph Bénié Bi Vroh : Il faut appeler au 143 qui est une ligne verte, donc gratuite. Ils vont vous donner les informations. Il faut éviter tout contact avec un animal qui est mort dans des conditions suspectes, ça c’est important. Il faut avoir ce qu’on appelle l’hygiène de la toux, C’est-à-dire qu’il faut tousser dans un mouchoir en papier. Il faut couvrir le nez avec ce mouchoir, et dès que vous finissez, il faut le jeter automatiquement à la poubelle. Si on n’a pas de mouchoir, il faut tousser dans le creux du coude.

Après le cas suspect qui a été confirmé négatif, qu’est-ce que vous pouvez dire aux populations ? 

Joseph Bénié Bi Vroh : Il ne faut pas céder à la panique. J’aimerais dire à la population de se tranquilliser que l’Etat de Côte d’Ivoire a pris des dispositions. C’est une maladie qui fait peur c’est vrai. C’est une maladie qui se transmet facilement dans l’air mais elle est quand même dangereuse. Mais comme c’est un virus qui est imprévisible et qu’on ne maîtrise pas pour le moment, il faut prendre des dispositions.

Nous pensons que nous pourrons faire face à une situation si elle survient avec le plus de vigilance possible avec une surveillance qui est très renforcée. Nous pensons que nous pourrons détecter s’il y a un cas éventuel ou s’il y a un cas suspect. Le plus important, comme il n’y a pas de vaccin, le seul remède qui nous reste c’est la prévention, se laver les mains, éviter les comportements à risque.

AIP : Quel sort pour les Ivoiriens présents en Chine qui souhaitent rentrer au pays ?

Joseph Bénié Bi Vroh : Ceux qui sont en Chine, s’ils veulent regagner leur pays, c’est leur droit. Mais il y a des dispositions qu’ils doivent respecter. Si des gens arrivent de la Chine, des dispositions prévoient qu’ils soient isolés ne serait-ce que 14 jours, parce que la période d’incubation est comprise entre deux et dix jours. Cela, pour éviter, si d’aventure ils étaient contaminés, qu’ils transmettent la maladie à d’autres personnes. On dit que la maladie peut même se transmettre avant l’apparition des signes et ça c’est important.

Comment se fait la collaboration entre vous les chercheurs ici en Côte d’Ivoire?

Nous avons commencé à voir un peu qu’est ce qui explique ça et en Chine : il y a trois groupes de chercheurs qui sont en train travailler sur le virus et on espère qu’on pourra trouver un vaccin. Au niveau de la recherche, il y a des tentatives qui sont en train d’être faites, aussi bien chez les psychologues, sociologues et environnementalistes. Il y a des initiatives qui sont en cours et je ne pourrai pas vous en dire davantage.

(AIP)

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