Le 5 mars, en jurant publiquement de se retirer au termede son 2e mandat à la tête de la Côte d’Ivoire, le Président ivoirien Alassane Ouattara avait rehaussé son image. Mais voilà…
C’est quasi officiel. Par la voix de son directeur exécutif interrogé hier par TV5, le Rhdp porterait son choix sur Alassane Ouattara pour défendre ses couleurs à l’élection présidentielle prévue le 31 octobre.
Sauf changement de dernière minute, cette décision, présentée par Adama Bictogo comme étant la volonté de la base, devrait se traduire en acte les semaines à venir. Ainsi, le chef de l’Etat sortant, dont le retrait, proclamé par sa proche bouche devant le Congrès à Yamoussoukro, a étéapplaudi le 5 mars dernier par les Ivoiriens et par le reste du monde, devrait bientôt se dédire. Et si cette volte-face se confirmait, son argument phare pour la justifier est déjà connu. Suite à la disparition brutale de l’ancien Premier ministre Amadou Gon Coulibaly, candidat initial du Parti unifié, seul lui Alassane Ouattara, est capable d’assurer une victoire à ce parti lors de la présidentielle prévue dans moins de quatre mois, et surtout, dira-t-il, pour « préserver la stabilité du pays ».
Quid donc de la « nouvelle génération » qu’il appelait à prendre la relève. Visiblement, au sein du Rhdp, cette nouvelle génération se résumait au défunt Premier ministre.
En acceptant de porter l’étendard du Rhdp à ce scrutin, Alassane Ouattara aura non seulement déçu, voire trahi, tous ceux qui lui auront rendu hommage pour sa « sage » décision de retrait, mais il aura donné de lui l’image négative d’un assoiffé de pouvoir.
En outre, derrière leurs ovations publiques, pour préserver leurs privilèges du moment ou éviter un retour de bâton en cas de contestation, des cadres de son clan accueilleront son entêtement comme un mauvais signal pour eux. Ils y verront certainement le message de leur incapacité à incarner cette fameuse nouvelle génération.
Tout en ternissant les belles pages qu’il était en train d’écrire dans sa propre histoire, et dans celle de la Côte d’Ivoire qui rêve d’assister au tout premier retrait d’un Président en fin de mandats, il risque de prendre un dangereux défi devant l’histoire. Car, Ouattara candidat pour un troisième mandat successif, son premier adversaire sera sa candidature. D’abord, quel qu’en soit le justificatif, elle montrera que sa décision de retrait n’était pas profondément sincère, et fera de lui, à jamais, un symbole du reniement de la parole donnée.
Ensuite, cette candidature sera forcément contestée.
En effet, si elle est fidèlement et honnêtement appliquée, la Constitution adoptée par référendum en 2016, n’autorise pas Alassane Ouattara à briguer un troisième mandat successif.
Art. 35 : « Le président de la République est élu pour cinq (05) ans au suffrage universel direct. Il n’est rééligible qu’une fois ».
Art. 55 : « Le président de la République est élu pour cinq (05) ans au suffrage universel direct. Il n’est rééligible qu’une fois ».
Si l’on y ajoute l’article 183 qui stipule au moment de l’adoption de cette Constitution que « la législation actuellement en vigueur en Côte d'Ivoire reste applicable, sauf l'intervention de textes nouveaux, en ce qu'elle n'a rien de contraire à la présente Constitution », et en l’absence de toute disposition transitoire ou spéciale se rapportant au Président en exercice au moment de cette adoption, Alassane Ouattara élu en 2010, réélu en 2015, ne saurait être rééligible une 2e fois en 2020.
Cependant nul n’est naïf. Si le chef de l’Exécutif décide de se porter candidat, c’est qu’il est sûr de faire valider sa candidature par les instances compétentes. Pourrait-il pour autant imposer cette candidature au Peuple ? L’histoire nous le dira.
Cissé Sindou