Et l’incivisme des «en haut de en haut » !





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le DP de pressecotedivoire.ci



Heureusement que la communication du ministre des Transports porte sur l’incivisme routier. Sinon, on lui aurait demandé sagement de revoir ses éléments de langage adossés à un narratif faux. Car l’incivisme, en Côte d’Ivoire, n’est pas seulement l’affaire des routiers. A moins que l’on ne considère que le substantif routier peut s’attribuer à tout usager de la route.

En tous les cas, s’il y a dans ce pays une «valeur» qui est partagée par tous, je dis bien tous, c’est l’incivisme. Et ceux qui empruntent la voie qui mène au Plateau, le centre des affaires, se retrouveront sans aucun doute dans ce que nous allons décrire. Il n’est pas rare de voir que la grosse cylindrée derrière laquelle vous vous trouvez sur la Corniche, transporte un haut gradé de l’armée.

Si vous êtes un fervent partisan du civisme, vous serez désagréablement surpris de voir une des vitres teintées de cette cylindrée descendre afin qu’une main bien fraîche en sorte pour jeter un papier emballage sur le bitume. D’autres fois, c’est un mégot de cigarette encore incandescent qui est lancé sous les pneus d’un autre véhicule. On a même vu des œufs préparés pourris jetés par-dessus les portières de véhicules de «boss» pour atterrir sur la voie bitumée que venaient de nettoyer de pauvres dames.

Ne vous trompez surtout pas pour rappeler à l’ordre ces «incivistes». Comme s’ils s’étaient passé le mot, ils répètent, sûrs d’eux-mêmes, que ces femmes qui s’occupent de la propreté de la voie n’auraient plus de boulot si tout le monde devrait garder sur lui ses déchets. Si vous n’êtes pas chanceux, ils vous «insultent proprement» et vous demandent après coup si la voie publique appartient à votre père et votre mère. En appuyant particulièrement sur les termes «mère» et «père».

Un vieil ami européen qui a vécu une de ces scènes un jour à Cocody avait décidé d’appuyer sur l’accélérateur pour rattraper la Mercedes noire, devant lui, qui venait de baisser une vitre pour jeter des ordures sur la voie publique. Quand il est arrivé au niveau du véhicule, il découvre que le propriétaire, assis derrière, était un haut gradé de l’armée. Déçu, il n’a pu placer un seul mot. Il s’est contenté de regarder les barrettes de l’épaule du colonel et de continuer son chemin.

Ces «en haut de en haut» comme les nomme l’Ivoirien moyen, ont besoin aussi d’une campagne axée sur l’insalubrité, prise ici comme englobant tout ce qui est contraire à l’ordre. Ce sont ces «en haut de en haut» qui, la plupart du temps, conduisent comme des chauffeurs de gbakas sur les voies publiques, surtout en temps de bouchon. Ils empruntent les sens interdits, les voies piétonnes ou les voies opposées et sont suivis dans cet acte abject par d’autres «incivistes» qui n’attendent qu’une telle occasion.

Après la campagne contre l’incivisme routier à laquelle nous souhaitons pleins succès, l’Etat devrait s’attaquer à un pan du déviationnisme. Cette fois, en ciblant les «en haut de en haut» pour leur incivisme comportemental. Parce que ce sont eux qui doivent donner l’exemple.

Le jour où les chauffeurs de gbakas vont surprendre un ministre, un directeur général de l’administration centrale ou un général d’armée dans un bouchon, attendant que la voie soit dégagée pour passer, ils seront patients comme tout le monde. Car à la vérité, c’est la patience qu’il faut leur enseigner.

Abdoulaye Villard Sanogo

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