Quand le livre nous met dans tous nos états





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Le livre était dans tous ses états à Abidjan, durant la semaine qui s’est achevée, lors du Salon international du livre d’Abidjan (Sila), le 13ème du genre. L’on aura remarqué que le livre, dans tous ses états, n’a pas manqué de nous mettre dans tous nos états.

Sous tous les aspects, sous tous les angles, le livre a montré notre comportement au quotidien dans la société. Il n’y a qu’à suivre les réactions des exposants vis-à-vis des visiteurs des stands pour comprendre dans quels états nous étions durant la période du Sila.

Il y a eu des visiteurs certes, mais très peu en ont profité pour faire des achats. Pourtant, c’est un moment propice pour s’offrir des livres d’autant qu’ils sont vendus au rabais. Pourrait-on expliquer le non-achat par la qualité des visiteurs qui étaient pour la plupart des élèves ?

Possible. Sauf que même les parents accompagnateurs n’ont pas daigné ouvrir leur porte-monnaie pour faire de petits cadeaux à leurs enfants. La faute à une non préparation de l’événement annoncé pourtant longtemps à l’avance comme le pensent certains écrivains ?

Ce n’est pas à exclure. Mais l’on pourrait aller chercher aussi dans le fait que pour certains, c’est un moment de balade avec leurs progénitures pour décompresser et oublier quelque peu les nombreux soucis qui les assaillent. Pour d’autres, aller à ce genre d’expositions peut leur permettre de faire des rencontres d’affaires ou de toute nature. Mais et si ce sont les portes-feuilles qui étaient vides ?

C’est fort possible. La plupart du temps, quand quelqu’un vient à un salon du livre, c’est qu’il a une expérience du livre, c’est qu’il a eu déjà un contact fort avec le livre. Il peut se déplacer à la recherche d’un livre perdu ou pour repérer des livres qu’il pourrait s’offrir bien plus tard. Alors venir à un salon du livre et ne pas s’en offrir un seul peut bien s’expliquer par la maigreur de la bourse.

En tout état de cause, un salon du livre révèle ce qu’est le livre et ce qu’il renferme. Le livre, c’est la vie. Il nous enseigne tout et parle de tout: l’amour, la quête, l’aventure, la violence, la joie, la haine, la responsabilité, la famille, l’histoire, la science etc. Le livre, c’est aussi et sans doute avant tout l’imagination, la création.

Pur produit de la société qui parle de la société, le livre ne peut se soustraire à celle-ci, sa mère nourricière. C’est la raison pour laquelle il peut se mettre dans tous ses états quand il est victime de l’imagination et de la création.

On ne le sait que trop, des tablettes de pierre et d’argile au livre fait de papier en passant par les rouleaux de papyrus de l’Egypte ancienne, l’imagination s’est mise au service de la création pour donner à lire à l’humanité. Cette création ne s’est pas arrêtée puisqu’aujourd’hui, avec les tablettes numériques, elle menace le livre dans sa contexture ancienne.

Depuis une dizaine d’années, chaque citoyen fait le livre à son image. Soit il lit un livre à l’ancienne soit il lit un livre reçu en PDF sur sa tablette numérique, son ordinateur ou son téléphone portable. Du coup, l’on est en droit de se demander lequel de ces livres était exposé au Salon international du livre d’Abidjan.

N’aurait-on pas eu plus de visiteurs et plus d’acheteurs si chaque citoyen avait le livre fait à son image ? Les partisans du missionnaire Gédéon de la Tchétchouva auraient répondu : «Question ! ».

Abdoulaye Villard Sanogo

 

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