Début mars 2022, à l’entame de la guerre en Ukraine, face à un conflit qui les dépasse, une quinzaine d'Etats africains, dont le Mali, la Guinée et le Burkina Faso, ont choisi de s'abstenir ou de ne pas participer au vote de la résolution de l'Onu exigeant que « la Russie cesse immédiatement de recourir à la force contre l’Ukraine ».
Sur les 193 États membres, 141 se sont prononcés en faveur de la résolution, 5 ont voté contre, 35 se sont abstenus et 12 ne se sont pas présentés au vote [ils n’y ont pas pris part]. Sur les 54 États membres africains, l’Érythrée a voté contre, 16 pays, dont l’Afrique du Sud, se sont abstenus et 9 ne se sont pas présentés. Près de la moitié (26) des 54 États membres africains ont donc choisi la voie de la neutralité.
Pour certains, cette neutralité en apparence dissimule des tensions et des non-dits. A la vérité, elle place de nouveau les pays africains au milieu d'un affrontement dans lequel ils n'ont rien à gagner. Les pays africains ont fondé leurs décisions sur une évaluation stratégique des répercussions du conflit dont ils pourraient souffrir.
Premièrement, certains pays africains, comme l’Afrique du Sud, considèrent que c’est l’Otan qui est ici l’agresseur, en raison de son élargissement vers l’Est. Cette absence de réactions peut être aussi liée aux relations bilatérales et multilatérales qu’entretiennent les pays africains avec ceux de l’Union européenne. Coopérations militaires, aides financières pour la construction d’infrastructures… qui pourraient être hypothéquées si l’on prenait parti pour tel ou tel camp.
Il faut noter aussi que de l’autre côté, il y a des relations de plus en plus fortes entre la Russie et certains pays de l’Afrique notamment avec la Centrafrique, le Kenya et actuellement le Mali, voire le Burkina Faso. Les autorités russes investissent aujourd’hui dans ces pays aussi bien dans le domaine militaire que dans le domaine économique et financier. La victoire de cette guerre étant incertaine, pour les Africains, il vaut mieux être prudent et observer une certaine neutralité.
Des sanctions ayant entraîné des difficultés d’approvisionnement
Dans un contexte d’insécurité et de crise économique engendrée par la pandémie de Covid-19, puis accentuée par la guerre en Ukraine, la priorité pour l’Afrique n’est pas de s’aligner sur la position de l’Otan, voire des pays européens. L’Afrique doit parer à l'urgence, trouver des solutions aux problèmes sociaux.
L’Union européenne (UE) ou les Etats-Unis ont imposé des sanctions ayant entraîné des difficultés d’approvisionnement. Le spectre de la crise de l’inflation et de la crise alimentaire pourrait conduire des États vers le gouffre et provoquer des troubles sociaux majeurs dans des régions déstabilisées par des conflits armés et des tensions politiques. Les pays africains doivent faire face aux violences des groupes armés, notamment djihadistes.
Trouver des solutions
Dans un contexte de crise mondiale à l’issue incertaine, les dépendances importantes ont révélé cruellement les vulnérabilités et les défaillances structurelles du continent africain, dramatiquement fragilisé par sa surexposition aux conjonctures internationales. C’est donc à juste titre que lors de la 77ème Assemblée générale des Nations Unies à New York, en mai 2022, le Président Sénégalais, Macky Sall, alors Président de l’UA, a de nouveau insisté sur l’importance de l’instauration d’un système de gouvernance mondiale plus juste.
Dans ce contexte de crise sécuritaire et économique, l'urgence pour les pays africains, est de trouver des solutions. Le continent doit aussi relever d’importants défis. La guerre en Ukraine divise les grandes nations. L’Afrique ne doit pas être le foyer d’une nouvelle guerre froide.