Faut-il brûler la France ? Est-elle un loup pour l’Afrique ? Consciente des tumultueuses relations avec l’Afrique, la France elle-même fait son mea-culpa. «Notre temps est passé. Il faut se rendre à l’évidence, nous décrochons complètement. Nous sommes à la fin d’un cycle », a constaté Alexandre Vilgrain (président du Conseil français des Investisseurs en Afrique (CIAN) de 2008 à 2022).
Effectivement, la France tend à perdre ses anciennes colonies africaines depuis quelques décennies. Elle est sans doute le seul pays au monde à se retrouver sous le « feu » des masses africaines. Comme principal grief, son simulacre d’indépendance accordée depuis 1960 aux pays africains derrière laquelle elle entretient toujours de façon voilée, sa colonisation. L’ancienne puissance coloniale perpétue son système colonial à travers ses bases militaires installées un peu partout sur le continent (Djibouti, Abidjan, Libreville…) à partir desquelles elle opère où et quand bon lui semble. Depuis les indépendances, il y a eu plus d’une dizaine d’opérations militaires spéciales de la France en Afrique en plus des différentes bases pré-positionnées. Cette présence militaire constante crée dans l’instinct collectif africain, un sentiment d’ingérence dans les affaires internes des pays. Comme le dirait le sage Africain: « C’est la façon de voler de l’épervier qui amène la poule et ses poussins à se cacher ». Le plus grand fossé qui a occasionné la suspicion des Africains vis-à-vis de l’ancienne puissance coloniale est son échec le plus flagrant au Rwanda en 1994. La France et sa puissante armée étaient présentes, le génocide aussi. Elle n’a pas réagi à temps. Conséquence, plus d’un million de morts. Des années plus tard, à Abidjan, l’Opération Licorne a essuyé encore une autre défaite face à la crise qui a opposé le candidat Alassane Ouattara (déclaré vainqueur aux élections de 2010) au Président sortant Laurent Gbagbo (refusant de céder le fauteuil). Encore des morts, (3000 selon les chiffres officiels). Rappelons également l’Opération Sangaris (RCA: Plus de 5000 morts), l’Opération Épervier (Tchad: Plus de 1000 morts), l’Opération Barkhane (Mali: Plus de 1000 morts), pour ne citer que celles-la.
Et pourtant, la France, en tant que puissance militaire mondiale avec de hautes technologies, devrait être en mesure de parer à toutes les éventualités en Afrique face à des armées et rébellions moins aguerries et sous-équipées. Ce n’est juste qu’une question de priorité. La priorité de la France en Afrique est ailleurs, en tout cas, la sécurité des Africains est loin d’être sa préoccupation. A cela, il faut ajouter le mépris de ses gouvernants face aux Africains. Nicolas Sarkozy (ancien Président de la France) a commencé son mandat présidentiel en 2007 en faisant remarquer, dans un discours un peu moins courtois le 26 juillet 2007 à Dakar, que « l’homme africain n’est pas suffisamment entré dans l’histoire ». Une phrase qui a fait jaser toute l’Afrique. Nicolas Sarkozy en poursuivant accusait l’Afrique d’être en partie responsable de ses crises: « La colonisation n’est pas responsable de toutes les difficultés actuelles de l’Afrique. Elle n’est pas responsable des guerres sanglantes que se font les Africains entre eux. Elle n’est pas responsable des génocides. Elle n’est pas responsable des dictateurs(...) Elle n’est pas responsable de la corruption, de la prévarication. Elle n’est pas responsable des gaspillages et de la pollution.».
Les malheurs de l’Afrique viennent des Africains. Au pays de Maurice Yaméogo, les hommes intègres ont fini par désintégrer leur partie « sans rien vaincre» avec leur score caniculaire de neuf coups d’Etat en seulement 60 ans d’indépendance (1966, 1980, 1982, 1983, 1987, 2014, 2015, 2022, 2022). En Libye, les compatriotes de Muhamar Kadhafi ont préféré le désordre et la misère des populations face à la « dictature » dans l’opulence de leur Guide. Le Sahel est en proie à des bandes de voyous armés menées par des Africains qui tuent leurs compatriotes au nom de Allah. Les exemples sont légions.
La Côte d’Ivoire n’a jamais caché sa coopération avec la France, mais traite également avec la Chine, le Maroc, l’Allemagne, les USA, l’Espagne, la Russie, l’Iran, l’Afrique du Sud.... Sans toutefois demandé à X de quitter son territoire au profit de Y. Sans fanfare ni trompette, elle se construit au fil des jours pour se hisser avec sa cosmopolite d’experts aux meilleurs rangs des pays en voie de développement. Comme on le dit à Abidjan « trop de viande ne gâte jamais une sauce ». Juste pour enseigner aux autres peuples que la multitude de partenaires en affaire est un gage pour un développement vrai.
La coopération avec la France est donc loin d’être la cause des problèmes de l’Afrique. Puisque pendant que certains Africains marchent pour la suspension des relations avec le pays du Général de Gaulle, saccagent et brûlent leurs biens, d’autres bravent la Méditerranée parfois aux prix de leur vie pour rejoindre l’oppresseur.
En d’autres termes, les États africains doivent tout simplement apprendre à bien défendre leurs intérêts, faire respecter leurs droits et surtout bâtir une nouvelle génération de personnes intègres pour une Afrique digne et prospère au lieu de voir le visage de la « méchante » France partout.
Par N’Guessan Félix