Youssouf Bakayoko, 76 ans, ex-député maire PDCI de Séguéla et ancien ministre des Affaires étrangères, n’est pas entré dans l’histoire de la Côte d’Ivoire ni de celle de la Commission électorale Indépendante (CEI) par la grande porte, auréolé de gloire. Prétendre le contraire comme a tenté subrepticement de le faire, le mercredi 2 octobre 2019. Coulibaly Kuibiert Ibrahime, nouveau président de la CEI, lors de la passation de charges avec son prédécesseur, serait sombré dans un triple mensonge. Se mentir à soi-même, mentir à Youssouf Bakayoko et mentir aux Ivoiriens ainsi qu’à la communauté internationale. « Nous viendrons régulièrement nous abreuver à votre source d’expérience », a soutenu Coulibaly Kuibiert Ibrahime s’adressant à Youssouf Bakayoko. Si elle existe, cette expérience électorale dont M. Youssouf Bakayoko serait détenteur, mérite-t-elle d’être une source à laquelle le nouveau président de la CEI pourrait s’abreuver dans la perspective de l’élection présidentielle cruciale d’octobre 2020 ?
Youssouf Bakayoko, c’est avant tout, la crise post-électorale sanglante de 2010-2011 qui a officiellement causé 3000 morts, des milliers de blessés, d’orphelins et de veuves. Une crise post-électorale qui a débouché sur un conflit armé et dans laquelle la responsabilité de la Commission électorale indépendante est entière. Mais surtout celle de son président Youssouf Bakayoko. Qui n’a pas su faire triompher la transparence électorale et la vérité des urnes. Qui a remporté l’élection présidentielle de 2010 ? Youssouf Bakayoko n’a pas eu le courage technique de le dire. Un courage technique fondé sur les résultats consolidés par le bureau central de la CEI, des résultats extirpés des fraudes massives etc. Youssouf Bakayoko, visiblement happé par le feu du parti-pris et celui de la peur, a commis l’ultime et gravissime faute de proclamer des résultats au quartier général (QG) électoral d’un des deux candidats au second tour de la présidentielle.
Dans le sport, cela équivaudrait à une suspension à vie de l’arbitre. Youssouf Bakayoko n’a donc pas été un bon arbitre. C’est le moins qu’on puisse dire. Si nous étions dans une démocratie, ce monsieur et les membres du bureau central de la CEI de 2010 n’auraient pas été maintenus pour les scrutins électoraux de 2015 et ceux d’après. D’autant que récompenser un mauvais élève revient à encourager la récidive de la médiocrité. La suite n’a pas été différente de l’échec de 2010. Les élections législatives de 2011 avec des élections partielles en 2012 et 2013, et en 2016 avec des élections partielles en 2016 et 2017 ont été toutes émaillées de violence et d’accusations de fraude massive. Les élections régionales et municipales de 2013 suivies de partielles et en 2018 suivies de partielles n’ont pas connu un sort différent.
A Grand-Bassam et dans la région du Moronou, par exemple, les représentants de la CEI ont été accusés, avec de forts soupçons, de fraude en faveur de certains candidats. L’image de la CEI est donc sortie davantage ternie de ces élections. C’est cette mauvaise image que Coulibaly Kuibiert Ibrahime et le nouveau bureau central de la Commission devront s’efforcer d’effacer afin de ressusciter la CEI. Vouloir alors s’abreuver de l’expérience de Youssouf Bakayoko constitue, par conséquent, moins un atout qu’une voie ouverte à une nouvelle déflagration post-électorale. A une nouvelle mort de la CEI.