Exilé en France, le candidat à la présidentielle d’octobre en Côte d’Ivoire estime que le chef de l’État sortant cherche, par une ruse constitutionnelle, à confisquer le pouvoir.
Le ton assuré et le verbe percutant, Guillaume Soro, 47 ans, n’a jamais reculé devant les obstacles, lui qui a échappé à plusieurs tentatives d’assassinat. Aujourd’hui, l’obstacle s’appelle Alassane Ouattara, le chef de l’État ivoirien, qui veut l’empêcher de rentrer dans son pays et de se présenter à l’élection présidentielle du mois d’octobre prochain. Pourtant, les deux hommes ont été très proches, compagnons de route même. Guillaume Soro a contribué à l’arrivée au pouvoir d’Alassane Ouattara, il y a dix ans, avant de devenir son premier ministre puis le président de l’Assemblée nationale. C’est un député en exil forcé qui s’exprime aujourd’hui dans les colonnes du Figaro.
LE FIGARO. - Alassane Ouattara a annoncé qu’il renonçait, contre toute attente, à se représenter pour un troisième mandat présidentiel en octobre 2020. Êtes-vous soulagé ?
Guillaume SORO. - Absolument pas. Alassane Ouattara est en train de procéder à une entourloupe digne de Vladimir Poutine quand, en 2008, ce dernier s’est fait remplacer par Dmitri Medvedev à la tête de la Russie avant de revenir à la présidence en 2012. D’ailleurs, Poutine s’apprête à récidiver en changeant la constitution de son pays afin de se garder une place centrale le jour où il quittera le Kremlin…
Alassane Ouattara chercherait, malgré tout, à rester dans l’ombre de son successeur ?
Oui, en changeant la constitution à ses seules conditions. C’est un coup de force pour deux raisons. D’abord, pareille réforme exige normalement un long dialogue préalable avec le peuple, puis la formation d’une assemblée constituante qui planche sur la rédaction d’une nouvelle loi fondamentale. Deuxième raison : le règlement de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest ¬(Cédéao), à laquelle appartient la Côte d’Ivoire, interdit de modifier une constitution six mois avant la date d’une élection présidentielle. Ce sera pourtant le cas puisque la nouvelle loi fondamentale devrait être adoptée par le Congrès ivoirien au printemps et que le scrutin doit, en principe, avoir lieu le 31 octobre suivant. Cette révision constitutionnelle est une forfaiture, un déni de démocratie.
Si la manœuvre se vérifie, peut-elle marcher ?
Alassane Ouattara veut propulser son actuel premier ministre, Amadou Gon Coulibaly, à la présidence et se réserver la possibilité que ce dernier le nomme ensuite vice-président, poste créé par la révision constitutionnelle. À l’origine, il était question que ce vice-président soit élu en même temps que le président dans le cadre d’un ticket, comme aux États-Unis. Alassane Ouattara a changé son fusil d’épaule, et sa ruse lui permet de faire croire à la communauté internationale qu’il ne se représente pas. En fait, il se ménage une place, ni vu ni connu. C’est du Poutine-Medvedev. Sauf que personne ne doit être dupe, ici, de cette mascarade. Lire la suite sur blog.lefigaro.fr
(NDLR : le titre est de la rédaction de pressecotedivoire.ci )