La cour pénale internationale (Cpi) est dans la tourmente. Sa traversée du désert semble sans fin. Tant cette juridiction internationale est décriée. Les pays africains réunis au sein de l’Union africaine (Ua), la structure continentale de coopération entre les Etats, veulent claquer la porte.
Leur menace, vive sous l’ancienne présidente de la commission de l’UA, la Sud-Africaine NKosazana Dlamini-Zuma, n’a pas été abandonnée même si les clameurs de colère se sont tues sous l’actuel président de la commission, le Tchadien Moussa Faky Mahamat.
Et pourtant sur les 54 pays que compte le continent, 33 ont signé et ratifié le Traité de Rome qui fonde la cour pénale internationale.
En se fiant à ces données, on pourrait affirmer que l’Afrique adhère pleinement à la Cpi. En vérité, au fil du temps et de l’exercice de la Cour, les pays africains et leur opinion publique ont fini par la percevoir comme « un tribunal de Blancs » qui sert de bras « armé » à la communauté internationale contrôlée par les Blancs pour soumettre de «force» les Noirs Africains qui ne s’inscrivent pas dans leur vision du monde. Pour de nombreux Africains, la Cpi est vue comme un instrument pour semer la zizanie dans leurs pays respectifs.
Autre réprobation contre la Cpi et non des moindres, celle des Etats-Unis d’Amérique. C’est-à-dire du plus gros contributeur financier de l’Organisation des Nations Unies (Onu), marraine de la juridiction internationale installée à La Haye. On se souvient encore des mots quasiment assassins prononcés, le 10 septembre 2018, par John Bolton, le conseiller à la sécurité nationale du président américain Donald Trump, qualifiant la Cpi d’«inefficace, irresponsable et carrément dangereuse ». Et d’ajouter : « La Cpi est déjà morte à nos yeux ». Les Etats-Unis ont assurément dit haut ce que d’autres pays puissants pensent bas de la juridiction internationale basée à La Haye.
Comment la Cpi peut-elle redorer son blason face à cette vague d’ostracisme ? Le défi est grand. Est-il insurmontable ? Pas du tout, à notre avis. A l’unique condition que la cour pénale internationale se lance dans une introspection sincère de son action en Afrique et à travers le monde. Quelle se remette en cause et sorte du carcan de la victimisation. Parce qu’elle n’est pas exempte de reproches ni de fautes.
Punir les auteurs de crimes contre l’humanité et de graves violations des droits humains constitue une tâche noble si elle s’effectue en toute indépendance et dans une impartialité sans faille. Bien qu’ils n’approuvent pas tous forcément la gouvernance politique d’Omar Béchir, l’ubu soudanais, certains Africains se demandent pourquoi la Cpi le poursuit alors qu’elle n’ose pas inquiéter George Walker Bush, Dick Cheney et Collin Powell, les trois dirigeants américains qui ont anéanti l’Irak. Les victimes civiles irakiennes n’ont-elles pas droit à la justice au même titre que les civils soudanais ? Par ailleurs, le cas de la Côte d’Ivoire où la Cpi poursuit un camp, tout en ignorant l’autre pourtant aussi impliqué dans la crise postélectorale de 2010-2011 se pose en un autre facteur de crispation pour l’image de la Cour sur le continent africain et dans le monde. Un nouveau procureur succédant au duo controversé Luis Moreno-Ocampo et Fatou Bensouda pourrait peut-être restaurer les choses.