La campagne de vaccination contre le Covi-19 a démarré le 1er mars 2021 avec l’administration d’un lot de 504 000 doses de vaccin AstraZeneca aux personnels de santé, aux forces de défense et de sécurité ainsi qu’aux enseignants.
En dépit de l’assurance donnée par des membres du gouvernement dont le ministre d’Etat Patrick Achi qui a retroussé la manche de sa chemise pour se faire vacciner, la population reste encore sceptique à l’exemple d’un agent administratif qui doute encore de l’existence du coronavirus.
« Je me demande bien si ça existe cette histoire de coronavirus. Mesures barrières là, je n’ai jamais observé, mais je suis là, toujours en forme. Je ne me vois pas aussi en train de me faire vacciner », s’obstine Eloh Jules, lors d’un micro-trottoir au Plateau, quelques heures après la cérémonie officielle de lancement de la campagne de vaccination.
Un avis partagé par des Abidjanais qui, dans les coins de rue, aux maquis, restaurants ou dans les grandes surfaces et bien d’autres espaces, balaient du revers de la main l’existence de la maladie à coronavirus, Covid-19, et même de la qualité des vaccins pour freiner la progression de cette pandémie mondiale.
Fondant leur opinion sur le faible taux de positivité enregistré en Afrique, les populations estiment que le Covid-19 est une maladie pour les Blancs et les Asiatiques et non pour les Africains. Certaines expriment leur ras-le-bol, parce que exacerbées par les nombreuses campagnes de sensibilisation sur le respect strict des mesures barrières pour éviter de contracter la maladie.
« Vous commencez sérieusement à nous fatiguer avec votre affaire de coronavirus. Les écoles, maquis, restaurants, églises et mosquées sont ouverts. Donc la maladie à coronavirus est finie dans notre pays. La levée du couvre-feu égale la fin du coronavirus », affirme avec conviction Dame Adjoua Martine, vendeuse de poissons au marché de Selmer, dans la commune de Yopougon.
Foulant au pied les mesures barrières, ces “disciples de Saint Thomas” (ne croient pas sans avoir vu) ont aussi du mal à accepter le vaccin. Chacun y va de son commentaire. Machination montée de toute pièce pour gruger les Africains, vaccins aux effets secondaires graves, conçus pour être injectés aux Africains vus comme des cobayes…
« Le Covid-19 existe bel et bien », soupire Dame Kouassi Angèle qui a du mal à oublier le décès de son oncle des suites de cette pandémie. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le cumul des cas au niveau mondial dépasse les 110 millions de personnes, dont plus de 2,4 millions de cas de décès, un an après la survenue de la maladie.
« Ce virus n’est pas une maladie de Blanc, de Chinois qui ne touche pas les Noirs. C’est un virus, il attaque tout le monde. Il faut donc respecter les mesures barrières. Dites aux autres que ce n’est pas amusement. Qu’ils aillent se faire vacciner », fait savoir un agent de la police municipale.
Se faire vacciner pour se protéger et protéger les autres
Depuis la découverte du 1er cas de Covid-19 le 11 mars 2020, le gouvernement ivoirien n’a de cesse d’appeler à la responsabilité de tous, à savoir observer les mesures barrières que sont le port d’un masque ou cache-nez et le respect de la distance physique. Avec l’arrivée des premières doses de vaccin, des autorités nationales sont montés au créneau en se faisant injecter la première dose en guise d’exemple.
« Nous avons aussi tenu, en tant qu’autorités, à montrer l’exemple pour encourager chaque ivoirien et chaque ivoirienne appartenant au public qui sont en première ligne et qui font face au Covid-19 à venir, après nous, se faire vacciner », a déclaré le secrétaire général de la présidence, le ministre d’Etat Patrick Achi, qui a lancé officiellement la campagne de vaccination contre le Covid-19.
Même son de cloche pour les partenaires dont l’OMS qui multiplient les appels à la vaccination. Dans le contexte épidémique mondial actuel, se faire vacciner est plus qu’un geste personnel, un acte de santé publique, de solidarité et de charité envers les plus vulnérables, souligne l’OMS qui estime que c’est un geste de salut public pour les économies en souffrance et une contribution à la sécurité sanitaire mondiale.
« Personne, en effet, ne sera en sécurité tant que tout le monde entier ne le sera pas », prévient le représentant résident de l’OMS en Côte d’Ivoire, Dr Jean-Marie Vianny Ouédraogo.
Sous-directeur à l’Institut national de l’hygiène publique (INHP) en charge de la vaccination et membre de la coordination nationale pour le déploiement de la vaccination Covid 19 en Côte d’Ivoire, le Pr Tiembré Isaac rassure sur la sûreté et l’efficacité du vaccin AstraZeneca acquis gracieusement grâce au mécanisme Covax.
« C’est un vaccin qui est efficace, puisque l’efficacité se trouve autour de 70%, mais également qui est sûr. Il a très peu d’effet indésirable grave comme cela a été démontré dans les essais cliniques. C’est un vaccin qui s’adapte à notre système de vaccination. Il se conserve entre deux et huit degrés, et nous sommes habitués à ce type de vaccin. Nous allons pouvoir l’utiliser parce qu’il s’adapte bien à nos réalités », affirme-t-il.
Près de 70% de la population visée
Le gouvernement ivoirien vise la vaccination contre le virus Covid-19 d’environ 20 millions de personnes, près de 70% de la population, a annoncé lundi 1er mars 2021 le ministre de la Santé et de l’Hygiène publique, Dr Eugène Aka Aouélé.
Une cible prioritaire d’environ six millions de personnes, soit 20% de la population, est concernée par cette vaste campagne dont 3% pour la première phase constituée du personnel de santé, des forces de défense et de sécurité et des enseignants.
La phase 2 sera adressée aux personnes de plus de 50 ans, aux porteurs de pathologies chroniques et aux voyageurs tandis que la phase 3 va viser la population carcérale et les personnes âgées de 18 à 49 ans, soit 49,3% de la population estimés à près de 14 millions d’habitants.
« Les coûts opérationnels et les vaccins relatifs à ces phases seront supportés par le pays et les partenaires », a fait savoir Dr Aka Aouélé qui a précisé que le vaccin est volontaire et gratuit.
Deux voies d’acquisition des vaccins retenues
La Côte d’Ivoire a retenu deux voies d’acquisition des vaccins. Les vaccins gratuits via Covax et l’Union africaine, et ceux payant sur le marché mondial, selon le ministre de la Communication et des Médias, porte-parole du gouvernement, lors d’une conférence de presse bilan en janvier.
Le ministre Sidi Touré a indiqué que le processus d’acquisition gratuite ou onéreuse est enclenché. Depuis la constatation de la reprise épidémique de la maladie, notamment à la date du 15 janvier 2021, le gouvernement a fait une requête afin de bénéficier gratuitement de doses du vaccin.
“Cette première commande qui s’inscrit dans le cadre de l’initiative COVAX, dont vont bénéficier 92 pays dans le monde, sera livrée en février prochain. Le début de la vaccination contre la Covid-19 débutera dans le mois de février”, avait déclaré en janvier 2021 le porte-parole du gouvernement.
La Côte d’Ivoire s’est également engagée dans un processus d’acquisition de vaccins payants sur le marché mondial, pour prémunir environ 50% de la population contre le Covid-19. Le choix de ces vaccins est soumis à trois critères, à savoir l’efficacité du vaccin, la disponibilité de la chaîne de froid pour la conservation du vaccin à la température requise et le prix.
Le ministère de la Santé et de l’Hygiène publique a enregistré, mardi 2 mars 2021, 138 nouveaux cas de Covid-19 sur 2 251 échantillons prélevés, soit 6,1% de cas positifs, 154 guéris et aucun décès. A cette date, la Côte d’Ivoire compte donc 32 929 cas confirmés, dont 31 866 personnes guéries, 193 décès et 870 cas actifs. Le nombre total d’échantillons analysés est de 426 876.
(AIP)