Portrait : Charles Konan Banny, le banquier réconciliateur





portrait-charles-konan-banny-le-banquier-reconciliateur


L’ancien premier ministre ivoirien, Charles Konan Banny est décédé le vendredi 10 septembre 2021 à l’hôpital américain de Neuilly,  à 78 ans des suites de la Covid 19. Mais qui est celui qui a occupé des postes politiques très importants en Côte d’Ivoire ? Portrait.

Fils de planteur baoulé, un des plus importants groupes ethniques de Côte d'Ivoire, Charles Konan Banny est né le 11 novembre 1942 à Divo, la capitale de la région du Lôh Djiboua, située à 180 km au nord-ouest d'Abidjan. Il est le fils de François Konan Banny, frère cadet de l’intendant général François Konan Banny et de Jean Konan Banny. Mais aussi, demi-frère de l'ex-conseiller spécial de la primature Firmin Brou

Il a eu un parcours scolaire brillant dans le secondaire, décrochant à Abidjan un baccalauréat scientifique. Ce diplôme lui ouvre les portes de la prestigieuse Ecole supérieure des sciences économiques et commerciales de Paris (ESSEC) d'où il sort titulaire d'un Diplôme d'Etude supérieures (DES) en sciences économique en 1968.

Un an plus tard, il rentre au pays et devient chargé de mission à la caisse de stabilisation et de soutien des prix des productions agricoles (Caistab). Cet organisme, qui gère l'argent du cacao dont la Côte d'Ivoire est le 1er producteur mondial. En 1970, Charles Konan Banny retourne à Paris, où il est secrétaire général adjoint, puis secrétaire général de l'Organisation interafricaine du café (OIAC).

En 1976, il intègre la BCEAO à Dakar, où il gravit tous les échelons: directeur central des études en 1983, directeur national de la BCEAO pour la Côte d'Ivoire trois ans plus tard. A ce titre, il est nommé gouverneur suppléant pour ce pays au Fonds monétaire international (FMI). Conseiller spécial du gouverneur de la BCEAO à partir de 1988, il est gouverneur de la banque par intérim de 1990 à 1993, en remplacement de l'actuel président Ivoirien Alassane Ouattara. Il est confirmé dans ses fonctions de gouverneur le 1er janvier 1994, sur décision du Conseil des Ministres de l’Union Monétaire Ouest Africaine prise conformément aux dispositions de l’article 41 des Statuts de la BCEAO, pour un mandat de 6 ans renouvelable.  Pendant cette mandature, il a pris l’initiative de créer un Comité Historique, constitué d’éminents universitaires et de témoins vivants de l’histoire de la BCEAO, auquel il donne pour mission la rédaction de l’histoire de l’Union Monétaire Ouest Africaine. Son mandat de Gouverneur de la BCEAO a été renouvelé le 17 juin 1999 pour une période de 6 ans, à compter du 1er janvier 2000.

Sous l’autorité de M. Charles Konan Banny, la BCEAO a engagé de grands chantiers dont la réforme des instruments de politique monétaire en vue d’adapter les règles et procédures de la Banque Centrale aux mutations de l’environnement. Les innovations introduites à cet effet portent essentiellement sur la mobilisation accrue de l’épargne intérieure, à l’appui d’une réduction progressive du rôle de la monnaie centrale, l’abandon de la gestion administrative au profit d’instruments de régulation indirects, souples et flexibles répondant aux exigences des mécanismes de marché, le renforcement de l’organisation et de la surveillance bancaire, avec la création en octobre 1990 de la Commission Bancaire de l’UMOA et la mise en place d’un nouveau dispositif de surveillance et de contrôle de l’activité bancaire.

Cependant, en
avril 2004, il créé, sans y avoir été autorisé ni par le Conseil des ministres de l’UEMOA,  ni par la Conférence des chefs d'État, le Fonds d'actions communautaires de l'Union monétaire ouest-africaine (FAC-UEMOA), doté d'un budget de 40 milliards de francs CFA. C'est du moins la critique qui a été formulée contre lui, à la conférence extraordinaire des chefs d'État de l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) tenue à Niamey le 11 octobre 2004, par le président de la République du Sénégal. Afin d'y voir plus clair, les chefs des États membres de la BCEAO demandent un audit, lequel révélera un déficit estimé à plusieurs milliards de francs CFA.

A lire également: Portrait : Henriette Dagri Diabaté, un modèle de vie et de travail

De la banque à la politique…

Charles Konan Banny est alors contraint de quitter le domaine bancaire. Le 4 décembre 2005, en pleine crise politico-militaire, il est nommé premier ministre de la Côte d’Ivoire, par la médiation africaine, avec pour priorité d'organiser le scrutin présidentiel le 31 octobre 2006 au plus tard. Désigné Premier ministre de la transition, l’homme est connu comme un brillant technocrate qui fait ses premiers pas en politique. Bien avant, en mai 2005, par l'intermédiaire de son frère aîné Jean, membre du Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI, ancien parti unique), il manifeste son intention de briguer la magistrature suprême. Mais il reste silencieux sur cette ambition.

Dans la nuit du 19 au 20 août 2006, le scandale des déchets toxiques éclate. Il présente alors sa démission et celle de son gouvernement au président Laurent Gbagbo qui était alors au pouvoir. Ce dernier le reconduit immédiatement dans ses fonctions. Banny forme un nouveau gouvernement le 16 septembre 2006. C’est le 29 mars 2007 qu’il quitte la primature.

A la Réconciliation nationale…

A la faveur de la crise de 2010-2011, Charles Konan Banny est désigné  président de la Commission pour le dialogue, la vérité et la réconciliation (CDVR) de septembre 2011 à décembre 2014.

Après cet épisode, Charles Konan Banny dépose sa candidature à l’élection présidentielle de 2015 sous la bannière de la Coalition nationale pour le changement, une branche dissidente du parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA) d’Henri Konan Bédié

Mais il se retire avant le premier tour, dénonçant comme la quasi-totalité des candidats de l’opposition une "mascarade électorale". Son retrait intervenant cependant après la validation de sa candidature par le Conseil constitutionnel. Il figure alors sur les bulletins de vote et obtient 0,3 % des suffrages exprimés, Alassane Ouattara étant réélu avec 83,7 %.

Outre ses fonctions de Gouverneur, M. Banny est Président du Conseil d’Administration de la BCEAO, Président de la Commission Bancaire de l’UMOA, membre du Conseil Régional de l’Epargne Publique et des Marchés Financiers de l’UMOA et Administrateur de la Banque Ouest Africaine de Développement (BOAD). Charles Konan Banny est Officier de l’Ordre National de la République de Côte d’Ivoire, Commandeur de l’Ordre National du Lion de la République du Sénégal, Grand Officier de l’Ordre du Mérite de la République du Niger, "Citoyen d’honneur" de la ville de Sevran en France, Commandeur de l’Ordre National de la République du Bénin, Commandeur de l’Ordre National de la République du Mali. Il a également été décoré de la Médaille du Mérite et de la Coopération de la République de Guinée-Bissau.

Charles Konan Banny, le sportif et l’homme de culture…

Grand sportif,  il est passionné de football qu’il a longuement pratiqué, selon ses proches.  Charles Konan Banny consacre ses rares moments de détente à la lecture et à la musique. Il a d’ailleurs réalisé un album avec une chorale catholique.

M Banny est marié à Henriette Massandjé Banny et père de 4 enfants dont l’un Jean-Félicien André Dominique Banny est décédé des suites d'un accident de la circulation, le samedi 9 novembre 2019, à Abidjan.

Infecté par le SARS-CoV (Covid 19) à Abidjan, Charles Konan Banny est évacué vers la France le 7 septembre 2021.  Il est décédé le 10 septembre en France.

Solange ARALAMON

 

 

Partarger cet article

En lecture en ce moment

Affaire ''Hamed Bakayoko impliqué dans un trafic de drogue '', les États-unis montent au créneau

Côte d’Ivoire-Lesotho (éliminatoires Can 2023) : les Eléphants sont bien arrivés à San Pedro