Les choses en apparence anodines dont on se gargarise en pensant qu’elles ne sauraient être dommageables pour nous, nos proches ou même pour les autres peuvent avoir de grandes conséquences et il ne faut pas s’étonner des répercussions quand on provoque le désordre, la division, la haine et la tension. C’est ainsi que l’on peut résumer le sens de l’expression «Qui sème le vent récolte la tempête». Un adage populaire, bien connu à travers le monde, dont la grande portée morale n’échappe à personne.
Pour la petite histoire, cet adage remonte au VIIIème siècle avant Jésus-Christ et est apparu dans la Bible, précisément au livre du prophète Osée, en ces termes : « Ils ont semé le vent, ils récolteront la tempête » (Osée chapitre 8, verset 7). Du 8ème siècle avant Jésus-Christ à aujourd’hui 21ème siècle après Jésus-Christ, « Qui sème le vent, récolte la tempête » constitue un enseignement qui continue de parler aux hommes. Ceux de bonne volonté et ceux de volonté abjecte. Tous savent que celui qui crache en l’air, est condamné de recevoir la salive sur le visage.
Notre pays, la Côte d’Ivoire, est de plain-pied dans ce scénario sociopolitique depuis trois décennies et ne semble pas s’en défaire. Depuis 30 ans donc, les Ivoiriens rangés derrière leurs principaux leaders politiques sèment le vent et récoltent la tempête. Ils ont semé le vent du pouvoir totalitaire, de l’ivoirité, de la haine, de l’exclusion, du népotisme, de la violence politique et ont récolté la tempête du coup d’Etat, de la rébellion armée et de la guerre post-électorale. Cette tempête a mis le pays si en retard que les échangeurs qui apparaissent comme des infrastructures banales sous d’autres cieux, sont ici en Côte d’Ivoire, aux yeux des Ivoiriens, comme un graal, un acquis extraordinaire. Au point où le chef de l’Etat sous lequel ces infrastructures routières sont bâties est déifié, affublé du dénominatif de « grand bâtisseur ». Alors que s’il n’y avait pas eu de tempête ; les échangeurs, les ponts et les routes auraient été construits nombreux sous tous les régimes successifs.
Depuis le mercredi 23 juin 2021, une autre étape de la politique d’hara kiri dont la Côte d’Ivoire est coutumière, ces 30 dernières années, a été franchie à travers la condamnation à la prison à vie de Guillaume Kigbafori Soro, ancien Premier ministre et ex-président de l’Assemblée nationale. Son mouvement politique GPS a été dissous et certains de ses proches collaborateurs ont écopé de 20 ans de prison ferme. La raison ? Selon le pouvoir en place, Soro et ses hommes préparaient un coup d’Etat contre le président Alassane Ouattara.
Vrai ou faux, cette affaire qui sent le soufre préfigure d’une nouvelle crise politique après celles qui ont opposé Bédié à Ouattara, Gbagbo à Bédié puis Ouattara à Gbagbo. Pendant que Ouattara et Bédié englués dans leur nouvelle crise née en 2018 n’ont pas encore rendu les armes, une autre bataille Ouattara-Soro surgit. Comme si nos politiques ne voulaient donner aucun répit au pays. Ils adorent la tempête et prennent plaisir à semer le vent. Là où on attendait d’eux, une introspection de sagesse afin de donner la chance à la réconciliation et à la paix. Alassane Ouattara et les autres nous offre les signes avant-coureurs d’une déflagration. «Qui sème le vent, récolte la tempête». A méditer.
Didier Depry
didierdepri@yahoo.fr