L’ancien président, Laurent Gbagbo a effectué les 9 et 10 décembre 2022, une visite d’« amitié » dans la région de la Mé. A Adzopé où il a tenu son meeting de clôture, Laurent Gbagbo s’est indigné des violences qui ont précédé cette visite et délivré un message d’espoir aux jeunes
Ci-dessous, le discours intégral du président Laurent Gbagbo au meeting d’Adzope
Chers amis, chers parents, je suis ému d'être ici. Je suis heureux et ému d'être encore sur ce stade. Quand je n'étais pas Président, je venais ici, quand j'étais Président, je venais ici. Je ne suis plus Président, je viens ici.
Je commence par ces mots pour dire que j'ai été très attristé de voir que quelques personnes voulaient m'empêcher de venir ici. Mais ces personnes-là, elles viennent d'où ? Elles ne viennent pas de Côte d’Ivoire ou quoi ? Ici, c'est le stade d'Adzopé et cette ville-là, elle s'appelle Adzopé. Elle est la capitale administrative de ce qu'on appelle aujourd'hui la région de la Mé mais qui est la région des Akyé, des Gwa et des Agni. C'est ici que nous sommes. Et moi je m'appelle Gbagbo Laurent.
Quand j'étais président, que j'allais à Abengourou ou à Bouna, je venais en voiture ici et je prenais mon hélicoptère pour continuer le chemin. D'où viennent ces personnes? Heureusement que les autorités administratives, avec à leur tête le Préfet de Région, ont permis des discussions qui ont abouti à la rédaction d'un communiqué commun. Je voudrais remercier le Député du RHDP qui a participé avec Professeur Boni Beda à la rédaction de ce texte apaisant qu'ils ont lu, même si les excités ne sont pas complètement apaisés parce que même aujourd'hui ils voulaient empêcher les gens d'arriver. Mais vous qui connaissez le pays, vous qui connaissez l'histoire, allez leur expliquer que lui là c'est Gbagbo Laurent et dans la Mé, c'est chez lui. Allez leur dire ça. Avant, quand je n'étais pas encore Président, je quittais même Abidjan, quand les camarades étaient en campagne pour la députation ou la mairie, je m'en souviens une fois pour la Mairie pour Léon et Agnès monnet, je prenais ma voiture, je conduisais, je participais à un ou deux meeting et je rentrais chez moi à la maison. Mais alors, où vient brusquement que les gens disent Gbagbo ne doit pas venir ici ? Mais où étiez vous quand je venais prendre un déjeuner ici et retourner ? Il ne faut pas faire ça, ce n'est pas bien. Il ne faut pas faire comme si on ne sait pas, parce qu'on sait et que tout le monde ici sait.
On ne peut pas empêcher un homme politique d'aller dans une région. On ne peut pas le faire, parce qu'on crée le tribalisme, en le faisant. Moi je ne suis pas Akyé, mais je suis d'ici. Je ne sais pas si les gens comprennent ça. On a pas besoin d'être d'une ethnie pour être d'une région. Non, non et non. Mais est-ce que ceux là sont plus Akyé que moi? Ahaaaa, c'est difficile ça. Donc je voudrais dire qu'il ne faut pas créer de tribalisme. Depuis la création du multipartisme, et j'ai participé un peu à l'avènement du multipartisme, un tout petit peu, je n'ai jamais interdit à quelqu'un d'aller parler à Gagnoa, jamais. Jamais, je n'ai interdit à aucun homme politique d'aller à Gagnoa, Ouragahio, Guiberoua pour faire un meeting.
Même mieux, en 1995, le FPI que je dirigeais et le RDR ont décidé de faire le boycott actif de l'élection présidentielle. Alors à Gagnoa, le Ministre de l'Intérieur a suspendu les élections législatives et les élections municipales. Quand un an après, il a reautorisé la tenue de ces élections là, au moment des élections municipales, Laurent Dona Fologo, qui était à l'époque Secrétaire Général du PDCI-RDA, a programmé de faire un meeting à Ouragahio le vendredi précédant l'élection. Moi aussi, j'avais programmé un meeting chez moi à Ouragahio. Or Ouragahio c'est un petit village, on ne peut pas y faire deux meetings. Les gens iront à l'un et boycotteront l'autre et suivez mon regard. Donc pour ne pas le mettre mal à l'aise, j'ai mis le vendredi mon meeting à Guiberoua pour le laisser venir, et j'ai laissé un bélier, au candidat à la Mairie qui était assuré d'être élu, pour le remettre à Fologo en signe de bienvenue. Fologo est venu, il s'attendait à être hué, il s'attendait à être lapidé, parce qu'on était dans la phase du boycott actif, il trouve M. le Maire qui se tient au lieu de son meeting, lui apporte le bélier et lui dit le Président Laurent Gbagbo te souhaite la bienvenue à Ouragahio.
Quand un homme n'a pas peur, c'est comme ça il agit. Quand quelqu'un n'a pas peur, c'est comme il agit. Moi, je n'ai pas peur. Je lui ai offert un bélier et je n'en ai pas parlé. C'est lui sur le champ qui en a parlé à la radio, à la télévision et à Fraternité Matin. La semaine qui a suivie, nous sommes arrivés à Abidjan, le Cardinal nous a invité lui et moi à une messe et nous a demandé de prendre la parole. je le redis ici aujourd'hui que cet exemple peut servir à tous les hommes politiques. Parce que ceux qui se sont excités, pour empêcher ma venue dans la Mé, ont manifestement peur. Ils n'ont pas peur de moi mais ils ont peur des combats internes à leur propre Parti. Moi ça fait longtemps que je suis sur la route, j'ai occupé les postes qu'eux tous cherchent. J'ai été Député, j'ai été Président de la République, je veux quoi encore ? J'ai peur de quoi encore ? Ce qu'ils cherchent et ils ont peur entre eux, j'ai déjà eu ça. Donc s'ils ont peur entre eux, qu'ils restent entre eux mais qui ne mettent pas ça sur moi qui est déjà eu tout et qui suis là pour aider les autres. Non, on ne fait pas comme ça. Dans un pays civilisé, on ne fait pas comme ça. Je le dis haut et fort, quand quelqu'un sert de telles idées, découragez le. Dites lui qu'il se trompe de route. Nous avons trop souffert pour le multipartisme, pour que des jeunes gens viennent pour mettre ça en péril. Nous étions ici, personne d'autre ne parlait quand nous sommes partis. Nous avons lutté. j'ai fait l'exil, j'ai fait la prison, je suis tombé ici, mais au moins aujourd'hui on a la liberté de venir à Adzopé et de parler aux peuples Akyé, Gwa et Agni. Il ne faut pas que leur peur, parce qu'il s'agit de peur, nous arrache ce bien là. Et puis, ceux qui disent ça, qu'est-ce que Gbagbo a à voir avec eux ? Rien, rien et rien. Donc il ne faut pas que leur peur nous arrache cette liberté essentielle que nous avons gagné. Je voulais commencer par ça pour dire que jamais à gagnoa, nous n'avons empêché quelqu'un d'aller s'exprimer. La peur est une mauvaise conseillère, une très mauvaise conseillère.
Mme le Maire, je vous salue, je salue le représentant de votre époux, je salue tous ceux qui sont ici et tous ceux qui sont là. Je salue les Chefs. On a intimidé beaucoup mais ils sont là. Sur ce même stade, je me rappelle que les Chefs m'ont bénir avant l'élection contre Guei Robert en 2000. Je suis venu me faire bénir ici. Je suis venu, ils disent qu'est-ce qu'il y a petit ? Je dis je vais à une élection contre Guéï Robert, il est militaire, il est effrayant. Ils m'ont dit : Va en paix et m'ont béni. Je veux donc saluer les Chefs. Les femmes, les jeunes, je vous salue vous tous.
Aujourd'hui je ne vais pas vous parler de mon séjour à la CPI. Un garçon quand tu vas à la chasse, il faut savoir que tu peux rencontrer beaucoup de gibiers mais tu peux aussi rencontrer beaucoup d'animaux féroces qui peuvent venir sur toi. Il faut être toujours prêt. Et quand un animal féroce vient sur toi et que tu te contentes de fuir, tu n'es pas un vrai chasseur. Parce qu'un vrai chasseur est prêt à affronter tout. Moi quand j'étais au CM2, je suis allé dans la brousse, mon père venait de tuer un éléphant et je suis monté sur l'éléphant. Il y avait une panthère qui rodait tous les soirs autour du village pour attraper les brebis, c'est mon père qui l'a tué. Donc je suis habitué à affronter les difficultés. Depuis mon enfance jusqu'aujourd'hui, j'affronte les difficultés. Je suis habitué. Donc ce ne sont pas les petites difficultés là qui vont me faire peur. Non, non, quand même, il faut me respecter un peu...Rires.
Leur parti s'appelle comment ? RHDP, Rassemblement des Houphouëtistes. Si je n'ai pas eu peur d'Houphouët lui même, ce n'est pas de ses enfants je vais avoir peur. Donc chers amis, il faut bannir la peur. On ne fait pas la politique quand on a peur. Mais en même temps, il faut que nous créons un système de démocratie pour que ceux qui veulent faire la politique n'aient pas de raison d'avoir peur. C'est pourquoi, j'appelle toujours à la libération des prisonniers politiques. Qu'ils soient militaires ou civils, j'appelle à leur libération. Un pays est apaisé quand il n'y a pas de prisonniers politiques. Regardez le petit Seka Yapo Anselme, il est d'ici. Il servait sous moi à la Présidence. Bon il est en prison, il y a d'autres militaires qui sont là-bas mais comme j'ai eu à le dire plusieurs fois et je le répète, c'est moi qui était le Chef des militaires, c'est moi qui leur donnait des mots d'ordre pour agir. Les militaires, les gendarmes, les policiers, c'est moi. On nous arrête par suite d'une défaite militaire. Moi on m'appelle en haut en haut, on croyait que là-bas je n'allais plus revenir. Je vais et les gens me demandent et je leur explique. On me pose des questions, je réponds. Mais quand tu n'as rien fait de mal, tu n'as pas peur et tu dis ce que tu as fait et tu dis ce que tu as dit aux gens de faire. J'ai dit la vérité, j'ai dit ça c'est moi qui ait fait ou ça ce n'est pas moi. Le procès a duré a proprement dit trois ans, le reste du temps on m'a baga baga( rires) mais je voyais, je savais qu'il y avait des calendriers politiques. La jeune dame, ma femme, Nady Bamba, c'est elle qui a déménagé pour aller s'installer en Europe pour s'occuper de moi. Donc voilà, finalement on m'a libéré et je suis venu et les gens sont étonnés. Je dis, mais pourquoi vous êtes étonnés? Vous m'avez emmené quelque part, on m'a jugé et on dit que je n'ai rien fait, mais les militaires qui servaient sous moi et qui sont encore en prison, ils font quoi là-bas ? Si moi le Chef, je n'ai rien fait, eux ils ont fait quoi ? C'est la sale question. Si le chef des militaires n'a rien fait, pourquoi le militaire est-il en prison. Question ? La réponse se trouve entre d'autres mains. Moi je n'ai que la question. Je demande qu'on les libère. Parce que moi qu'on a jugé en leur nom, je suis libéré. Il faut qu'on libère les jeunes dames comme Pulcherie Gbalet. Il paraît qu'on vient d'arrêter un autre, Peter 007. C'est à la télévision que j'ai entendu ce nom. Quand on arrête quelqu'un comme ça dans un pays, ça fait mauvais effet et ça fait une mauvaise réputation pour ce pays. J'ai été Président 10 ans, quel homme politique ais-je arrêté ? Et pourtant, ils m'insultaient, me critiquaient, me raillaient mais c'est quand tu n'as rien à dire que les gens t'insultent comme ça. Moi tu m'insultes, je t'insulte. Tu m'insultes, le lendemain je t'insulte. Tu ne vas pas en prison et tu es là et on se regarde. Quand tu seras fatigué d'insulter, et de te faire insulter, tu vas te taire. Prendre les gens et les mettre en prison, tu fais d'eux des héros, des chefs. Pourquoi je veux faire de mon adversaire un chef ? Il m'insulte, je l'insulte et c'est fini. Donc il faut libérer tous ceux qui sont en prison pour des raisons politiques.
Là, j'ai appris une bonne nouvelle. Que Blé Goudé , qui était avec moi à la CPI, est rentré. C'est une très bonne chose. Au moment où je parle, il doit être à Guibéroua, c'est une bonne chose et ça c'est un chapitre qui est clos. Maintenant il reste Soro Guillaume. Lui il fait quoi la-bas ? Il faut lui dire de rentrer. Je demande que Soro Guillaume rentre dans son pays. Parce que souvent on dit oui, c'est un enfant qui est impoli, il prépare tel coup, mais moi il ne préparait pas un coup, il a fait un coup contre moi. Il a fait une guerre civile qui est partie de Ouagadougou, avec la complicité du Burkina, et d'autres pays. Quand je l'ai rencontré, je l'ai appelé, je dis viens on va parler, on a discuté et je lui ai dit pour que tu aies confiance, allons chez ton parrain, le Président du Burkina Faso, et là-bas on a signé l'accord de Ouagadougou. Je dis bon allons en Côte d'Ivoire et je l'ai nommé Premier Ministre. Il a été étonné. Donc il y a plusieurs manières de tuer les conflits politiques. Il faut donc que Soro Guillaume rentre. Quand il va rentrer, il n'y aura plus de problèmes de son côté en tout cas.
Je voudrais avant de finir dire un mot sur les jeunes. Aujourd'hui, nous sommes en 2022. Les jeunes, ceux qui sont nés au moment où moi je devenais Président, c'est à dire en 2000, ont 22 ans maintenant. J'ai pris pour eux, avant leur naissance, une loi pour qu'à 18 ans, le jeune soit reconnu comme majeur et qu'il puisse voter aussi parce qu'à 18 ans, un jeune est un homme qui sait ce qu'il veut. Les jeunes ne soyez pas désespérés, il y a beaucoup de choses à faire avec vous. Mais souvent ceux qui gouvernent regardent ailleurs au lieu de regarder les jeunes. Je propose d'organiser, dans quelques mois, un grand rassemblement avec les jeunes. Jeunes garçons, comme jeunes filles, pour qu'on parle, parce qu'il y a beaucoup de jeunes avec nous, il y a beaucoup de jeunes au PPA-CI. Au cours de ce rassemblement avec les jeunes, nous allons trouver des pistes de sorties de crise pour chacun. Ce temps n'est pas encore arrivé mais soyez courageux.
Peuples de la Mé, soyez remerciés de m'avoir reçu ici. Soyez remerciés d'avoir prié pour moi. En 1990, quand on faisait nos premières élections législatives, nous avons eu un Député à affery, un Deputé à Akoupé et un Deputé à Adzopé Sous-préfecture. C'était trois députés sur 9 et c'était appréciable. Peuples de la Mé, je vous remercie. Dieu vous bénisse. Dieu nous bénisse, je vous remercie.
Source: Service Communication PPA-CI
N.B: Le titre et l'accroche sont de la rédaction