Affi, malgré lui





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Les initiés le savent. La politique, c’est une affaire de sorciers « où l’on mange et où l’on se mange ». Depuis que le RHDP, parti au pouvoir, a publié la liste de ses candidats devant prendre part aux prochaines élections municipales et régionales, les adversaires ou ennemis du président du FPI rient sous cape. Pour eux, il a été mangé par le sorcier RHDP.

« C’est fini pour Affi. Quoi qu’il fasse, il sera battu et son alliance avec le parti au pouvoir ne lui aura pas été bénéfique », déclarait un homme politique du nord ivoirien, ancien camarade d’Affi. Pour ce cinquantenaire, en maintenant son candidat face au président du FPI qui dit pourtant être dans une alliance avec le RHDP, le parti au pouvoir a opté pour la mort politique d’Affi.

Pourtant, du côté du président du Conseil régional du Moronou, il n’y a pas de quoi fouetter un chat. Le président de l’ancien parti au pouvoir en a déjà vu des vertes et des pas mûres. Ne serait-ce qu’aux dernières régionales où il a croisé le fer avec des candidats du PDCI et du RHDP. Il est sorti gagnant de cette épreuve. Pour ses partisans, il n’y a donc pas de raison valable qu’il ne réédite pas cet exploit.

Surtout que, selon eux, les voix qui seront dispersées le seront contre tous les candidats et pas seulement Affi. Toutefois, ils se disent confiants en raison du travail abattu par leur cheval durant sa première mandature. Travail qui, de leur avis, est visible et palpable par les électeurs. Les écoles, les collèges, les lycées, les centres de santé qui ont poussé dans la région du Moronou sont pour eux des éléments autour desquels se fera la communication électorale.

Leurs contradicteurs ne manquent pas d’arguments aussi. Premièrement, les électeurs verraient d’un mauvais œil que le président du Conseil régional sortant ait en face de lui son gendre, l’époux de sa nièce. Par ailleurs, ce dernier est un homme d’affaires que tout le monde dit très prospère. Il se raconte déjà que pour sa campagne pour les régionales, il aurait mobilisé la somme de 2 milliards de FCFA. Ce que, manifestement, le candidat du FPI ne pourrait pas faire.

Or, insistent les adversaires d’Affi, lors des votes, les populations n’en ont cure de savoir qui a construit quoi, qui a fait quoi mais plutôt qui a donné combien. Pour ces dernières, la période électorale est leur traite, le moment où elles se font un peu d’argent comme en période de vente de café-cacao. En clair, pour les contradicteurs d’Affi, s’il veut se succéder à lui-même à la tête du Conseil régional du Moronou, il lui faudra plus que des arguments bâtis autour de son bilan.

Ces arguments paraissent d’autant significatifs que cette année, l’ingénieur des travaux publics, l’ancien ministre Jacob Ahoua Don Melo, ancien bras droit d’Affi au FPI et comme lui, originaire de Bongouanou, qui a choisi de faire chemin avec Laurent Gbagbo au PPA-CI, est candidat pour le compte de ce parti aux régionales. Même si ce technicien n’est pas un homme du terrain politique, il va grignoter forcément les traditionnelles voix du président de son ancien parti.

Au reste, des informations proches du parti de Laurent Gbagbo indiquent que pour ne pas jeter un froid entre lui et son aîné Affi, Don Melo aurait proposé une sorte de liste commune à ce dernier qui aurait refusé poliment l’offre. Le président du FPI aurait proposé à son tour à son jeune frère de prendre d’abord l’avis de son patron et de revenir le voir. Selon nos informations, Don Melo n’a pas encore eu l’avis de Gbagbo. Il n’est donc pas revenu voir son aîné.

Une chose est sûre, les régionales prochaines vont attirer les regards de tous ordres mais pas autant que ceux qui se dirigeront vers le Moronou. Certains attendront secrètement que le lion du Moronou soit battu à plate couture, quand d’autres croiseront les doigts pour qu’il n’en soit pas ainsi. De tels projets antagonistes attirent forcément la presse qui ne tardera pas, nous en sommes sûr, à en faire ses gros titres. Qu’il le veuille ou pas, Affi sera au centre de l’actualité de ces régionales. Ce qui n’est pas mal pour un homme politique.

Mais d’ici à ce que la CEI ouvre le bal de ces joutes électorales, beaucoup de choses peuvent se passer comme le retrait, au profit d’Affi, du candidat du pouvoir dans le Moronou. Même s’il nous revient avec force que des démarches ont été faites dans ce sens vers lui et qu’il les aurait rejetées en bloc.

C’est, du reste, après l’échec de cette médiation que le directoire du RHDP aurait répondu aux trois principales propositions faites par le FPI comme substrat de l’alliance en gestation. Il s’agit, selon des sources dignes de foi, de la réconciliation, de la gouvernance et d’un accord électoral. Le parti de Ouattara qui dit rencontrer déjà trop de difficultés à convaincre certains militants à se retirer pour d’autres, n’a pas voulu s’engager avec le FPI sur le dernier point proposé.

C’est ce qui explique que chaque parti de l’alliance aura son candidat aux prochaines élections locales. Toutefois, selon les deux parties, il n’est pas exclu et il est même souhaité que des accords électoraux au niveau des localités se tissent pour faciliter les victoires.

Pour l’heure, dans l’opinion, que le président du FPI croise le fer avec un candidat du RHDP dans le Moronou n’est ni plus ni moins que l’annonce de l’échec d’une alliance annoncée depuis des lustres, tambour battant. Pour les spécialistes, c’est le FPI qui perd ainsi son refuge après avoir été rejeté par le PDCI et le PPA-CI dans une alliance que son président aura fortement contribué à mettre en place.

Cependant, aura-t-on tout dit et bien dit ? La politique, avons-nous averti dans l’incipit de cet article, est un camp de sorcier. So wait and see ! disent les Anglais.

Abdoulaye Villard Sanogo

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