Ce qui suscite l’intérêt de ce séminaire, ce n’est pas son organisation en tant que telle qui relève des activités routinières de toute structure sérieuse et ambitieuse. Ce qui retient ici l’attention, c’est l’opportunité même de l’organisation d’une telle activité dans un contexte politique où le RHDP règne pratiquement en maître absolu sur l’échiquier national. Voici un parti politique qui sort d’un processus électoral au terme duquel il a quasiment tout raflé et qui décide de faire son introspection pour être plus percutant. C’est en cela qu’il faut tirer une fière chandelle à la Direction de ce parti qui a décidé de s’inscrire dans une démarche d’amélioration continue.
Sur la question, Dr Guibessongui N’Datien Séverin, président du comité scientifique, a été très explicite sur les enjeux de ce séminaire dans un contexte où les autres formations politiques sont dans une dynamique de remise en cause de leur dispositif. « La logique politique est différente chez nous. Nous n’avons pas été défaits, mais nous sommes sortis victorieux de ce double scrutin local et sénatorial. Pour nous, ce séminaire consiste à faire notre introspection, malgré notre large victoire récente, pour assurer la pérennité de notre position de parti politique leader sur l’échiquier national ivoirien. Nous voulons maintenir et accroître notre avantage politique concurrentiel pour 2025, en toute sérénité », a indiqué le président du comité scientifique. Ce dimanche 19 novembre 2023, à la cérémonie de clôture de cette activité, l’on peut valablement avancer que les fruits sont à la hauteur de la promesse des fleurs.
Y a rien en face !
Comme recommandations majeures, le séminaire a proposé un nouveau logo, de nouveaux statuts et un nouveau règlement intérieur, un hymne, etc. Tout comme une entreprise commerciale, c’est dans cette logique que doivent s’inscrire toutes les formations politiques. Qu’elles soient au pouvoir ou dans l’opposition. Quels que soient la force et son statut du moment, il faut éviter de s’asseoir sur ses certitudes et se vautrer dans une sorte confiance aveugle, alors que les lignes politiques à l’ère du numérique sont très dynamiques. Cet exercice, l’ancien parti au pouvoir, l’a appris à ses dépens en 2010, en se laissant prendre au piège de la suffisance et de l’arrogance politique. Plus que jamais rassuré que rien, en dehors de « l’Eternel des armées », ne pouvait leur fait perdre cette élection face à des formations comme le PDCI-RDA et le RDR, l’ex-Majorité présidentielle avait préparé les esprits de ses militants et partisans à travers un narratif assez révélateur : « Y a rien en face ! ».
Et ceci, du sommet à la base. Après le premier et le second tours, l’ex-LMP était contraint de faire l’amer constat de ce qu’il y avait du costaud en face, qu’il ne fallait pas du tout négliger. Résultat, le régime Gbagbo a été proprement battu dans les urnes et aussi par les armes, du fait de son refus de céder le fauteuil présidentiel au vrai vainqueur de cette élection. Ce sont là des leçons que doivent capitaliser toutes les formations politiques. Et sans fioritures aucune, l’on peut dire que Laurent Gbagbo et son parti, le PPA-CI, avec du recul, ont assimilé la leçon après l’arrogance politique de 2010 où ils soutenaient bec et ongles, qu’il n’y avait rien en face. Après la bérézina aux élections locales et sénatoriales de septembre 2023, Laurent Gbagbo a dû faire un nettoyage à sec au sein de son système, sur la base de ce que l’on ne garde pas une équipe qui perd.
Aujourd’hui, comme hier, que l’on soit en politique ou dans une autre vie, il faut se rendre à l’évidence avec le philosophe Auguste Comte que « tout est relatif et seul cela est absolu ». Le RHDP, au-delà de tout ce que l’on pourrait dire sur sa gouvernance et ses méthodes, a le mérite de s’inscrire dans une position avant-gardiste. Et comme il n’y a aucun mal et aucune honte à copier les bons modèles, les autres formations politiques en Côte d’Ivoire devraient s’inscrire dans cette vision prospective du RHDP.
Kra Bernard