Ça se passe au Libéria. Tout près de nous. A l’extrême ouest. Le mercredi 24 janvier 2024, dans 16 jours exactement, au moment où les Aigles du Mali croiseront le fer avec les Brave Warriors de la Namibie dans le cadre de la 34e édition de la coupe d’Afrique des nations de football, les aficionados de l’élégance politique auront, eux, les yeux tournés vers le Liberia. Dans ce pays si proche peuplé de près de 5 millions d’habitants qui a connu deux guerres civiles, de 1989 à 2003 qui ont fait quelque 250 000 morts, sans compter l’épidémie du virus à Ebola de 2014 à 2015, on procède, en douceur, à la passation des charges entre le président sortant et l’entrant.
Elu depuis le vendredi 17 novembre 2023 lorsque George Tawlon Manneh Weah, 57 ans, le président en exercice, a reconnu humblement sa défaite, Joseph Nyumah Boakai, 79 ans, doit attendre 3 mois avant de prendre officiellement la tête du Liberia. Le pays est donc dans la transition. Là aussi, tout se passe dans la douceur. Le mérite en revient, comme on peut le constater, au peuple libérien qui assume ainsi son histoire et assure son avenir. Mais il faut surtout saluer l’intelligence, le courage et l’élégance d’un homme qui, sans être un homme politique chevronné et expérimenté, a surpris le monde entier, de la plus belle des manières.
Ce soir de ce vendredi 17 novembre 2023, alors que les résultats du second tour de l’élection présidentielle étaient toujours attendus, Weah s’est levé, a pris son téléphone et a joint son adversaire pour lui dire toutes ses félicitations au regard des procès-verbaux qui sortent des bureaux de vote. Boakai était en avance et il ne pouvait plus être rattrapé. Cette élégance que cherche l’Afrique de l’ouest en pleine journée, lampe-torche à la main, est saluée comme il se doit à travers le monde. Et les décideurs de ce monde attendent le jour de l’investiture du nouveau président libérien, jour de l’élégance politique, pour se rendre à Monrovia, afin de fixer ce mémorable temps dans les annales de l’histoire politique.
Le samedi 13 janvier 2024, soit dans 6 jours exactement, démarre la coupe d’Afrique des nations. Les yeux des Africains seront braqués sur cet événement sportif de grande ampleur et pourraient se détourner complètement de cette fête populaire, fête de l’élégance politique, si rare pour être soulignée d’un trait bleu. Il n’est donc pas superfétatoire de rappeler dans un éditorial ce moment clé de l’histoire ouest-africaine afin que nul n’en ignore. Car après la fête du football, il nous faudra retrouver nos réalités quotidiennes faites de promesses mirobolantes qui ne sont plus qu’un serpent de mer agité en des périodes bien particulières pour nous appâter.
Tout bien pesé, ce qui s’est produit au Libéria le vendredi 17 novembre 2023 mérite d’être chanté, poétisé et de figurer dans des films de dessins animés, dans des caricatures afin que cet acte soit rendu populaire. Car, ne l’oublions pas, George Weah a délivré d’un grand embarras les membres de la Commission chargée des élections, l’administration judiciaire à qui revient la proclamation définitive des résultats finals et bien d’autres obligés. Qui sait, peut-être que tout ce monde serait encore, à l’heure où nous écrivons ces lignes, en train de se chamailler pour désigner le nouveau président du Libéria. Chapeau bien bas, mister George !
Abdoulaye Villard Sanogo