Plongées dans un profond désarroi après les déguerpissements à Yopougon Gesco, des victimes espèrent une visite de Myss Belmonde Godo (Reportage)





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Ce bâtiment sert d'abri à certaines victimes des déguerpissements à Yopougon Gesco



Près d’un mois après l’opération de déguerpissement ordonnée par le ministre-gouverneur Ibrahim Cissé Bacongo, l’équipe de pressecotedivoire.ci s’est rendue dans la commune de Yopougon, plus précisément au quartier Gesco Pays-Bas. Des populations rencontrées sur le terrain ont lancé un message aux autorités ivoiriennes, en particulier, à la ministre Myss Belmonde Godo. 

Assis, dans la matinée de ce jeudi 14 mars 2024, à l’arrière d’une table positionnée sous une bâche dressée juste sur le site déguerpis du quartier Gesco Pays-Bas, dans la commune de Yopougon, Ballo Eric, un jeune résident dudit quartier, s’attèle à recenser les noms des personnes victimes des déguerpissements qui ont eu lieu, le 19 février dernier, sur instruction du gouverneur du district d’Abidjan, Ibrahim Cissé Bacongo. C’est en tout cas ce qu’a confié le jeune homme à l’équipe de pressecotedivoire.ci qui s’est rendue sur les lieux après cette opération qui continue de faire grand bruit.

« Étant donné que nous avons été tous surpris par ces déguerpissements, nous continuons de recenser les noms des personnes victimes, et les choses qu’elles ont perdues », explique le jeune homme, qui indique qu’au-delà des habitions, ce sont aussi des activités qui ont été impactées par cette opération : « Certains avaient des magasins, des commerces qui leur permettaient de vivre. Tout a été détruit en une seule journée. D’autres qui travaillaient à la zone industrielle ont perdu leur emploi, parce qu’ils ont déserté leur lieu de travail quand ils ont appris que leur quartier est en train d’être démoli. C’est donc toutes les personnes impactées que nous continuons de recenser, car c’est la mairie même qui a demandé qu’on le fasse », a-t-il ajouté.  

Tout en précisant que rien n’a été fait, pour l’instant, pour venir en aide de façon concrète aux victimes des déguerpissements de Gesco, le jeune homme révèle que certaines personnes n’ont toujours pas quitté définitivement les lieux. « Il y a des personnes qui n’ont certainement pas d’endroits pour dormir, qui reviennent ici pour passer la nuit. Il y a un bâtiment qui n’a pas été totalement démoli. Si tu arrives là-bas la nuit, ça fait pitié », révèle M. Ballo, qui nous conduit même au niveau de ce fameux bâtiment, devenu site d’accueil de certaines victimes. Il s’agit d’un bâtiment R+1 détruit partiellement. Autour de ce bâtiment, des décombres desquels se dégage une odeur d’excréments. « C’est dans un tel environnement que des gens viennent dormir la nuit. La journée, on ne sait pas où ils vont, mais la nuit, on les voit venir se coucher ici », dit-il, l'air dépité.

Kpan Jacquie, une autre victime de ces déguerpissements, déplore le fait que la ministre de la Cohésion nationale, de la Solidarité et de la Lutte contre la pauvreté, Mys Belmonde Dogo, n’ait pas encore mis les pieds à Gesco : « Il y a des personnes qui viennent faire des dons, on a vu le maire, Adama Bictogo. Simone Gbagbo a envoyé des émissaires pour faire des dons ici. On n’a vu d’autres personnalités ici, mais on n’a jamais vu la ministre de la Solidarité, alors que souvent, on la voit soutenir des personnes en détresse. Est-ce à dire que le gouvernement ne voit pas notre souffrance après ces déguerpissements ? », lance la jeune dame.

L’établissement Cha Hélène de Gesco renaît de ses cendres  

L’établissement Cha Hélène est au cœur d’une vive polémique qui enflamme les réseaux sociaux à la suite du fameux déguerpissement. C’est une école profondément impactée par cette opération qui essaie, tant bien que mal, de sauver l’année scolaire en cours. On le sait, une très grande partie de cet établissement a été écrasée par les bulldozers de Cissé Bacongo. Ce sont au total deux bâtiments de R+2 comportant une vingtaine de classes qui ont été détruits, selon une directrice de l’école. Seul un bâtiment de R+1, avec 12 classes est épargné. Il est séparé des autres bâtiments détruits par une route. 

 « Ce n’est pas un établissement annexe qui a été détruit comme les gens veulent le faire croire. Tout le premier cycle était logé sur le côté qui a été détruit. C’est une grande partie que nous avons perdue. Il y avait plus de 1000 élèves dans cette partie », confie la directrice Kouadio Amenan, qui fait savoir que la direction, comme mesure d’urgence, a dû faire passer tous ces élèves sur le bâtiment qui n’a pas été détruit. « Au début, ce n’était pas du tout facile. Certains élèves ne venaient même pas à l’école, parce que les maisons de leurs parents ont aussi été détruites. C’était la confusion totale au niveau des salles. Plusieurs classes se retrouvaient parfois dans la même salle, à la même heure », explique celle qui nous révèle qu’une partie des élèves est finalement transférée dans une autre école. « Nous avons fini par envoyer toutes les classes de terminale au Lycée Akandji qui n’est pas très loin d’ici. Et depuis lors, les choses sont en train de se normaliser », assure-t-elle.

Des mesures ont été prises par le gouvernement, des populations septiques 

A l’issue du conseil des ministres qui a eu lieu le mercredi dernier, le porte-parole du gouvernement, Amadou Coulibaly, a annoncé de nombreuses mesures visant à soutenir les populations affectées par le déguerpissement à Gesco et Boribana et à éviter que ces populations se réinstallent dans de nouveaux sites à risque. Il s’agit, entre autres, du relogement à hauteur de 250 000 FCFA par ménage. Le montant global du soutien de l’Etat aux populations affectées dans les quartiers Boribana à Attécoubé et de Gesco à Yopougon est évalué, sur la base de cette allocation forfaitaire, à 697 millions FCFA. En outre, le gouvernement va accompagner les propriétaires ayant des titres fonciers en vue de l’acquisition de parcelle en pleine propriété de même que la mise à disposition d’un terrain de 75 m2 ou de 100 m2, selon la taille de la famille avec la signature d’un bail emphytéotique sur une durée de 20 à 25 ans pour un loyer de 10 000 FCFA par mois. Au terme du bail, les nationaux impactés deviendront propriétaires des terrains attribués.

« On nous dit que les familles touchées auront 250.000 Fcfa, ce n’est pas rien. Au moins, cela peut aider à se trouver un petit logement. Mais comment ils vont s’assurer que tout le monde aura reçu cet argent? c’est là mon inquiétude. A dire vrai, je crois que ce sont des choses que le gouvernement dit pour avoir bonne presse, sinon à la vérité, chacun est livré à son propre sort », confie Miezan Jean, un autre habitant de Gesco.

Gaël ZOZORO

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