Curieux ami que la mort ! Aucun humain ne peut remettre en cause sa fidélité au dernier rendez-vous. Quand l’heure arrive, il vient frapper à la porte et à peine la porte entre-ouverte qu’il vous a déjà empoigné pour vous emmener avec lui. Il ne se trompe jamais de porte et est toujours à l’heure. Mais ce fidèle compagnon de l’homme a une particularité. Selon le philosophe Epicure, « La mort n’est rien pour nous, puisque tant que nous sommes, la mort n’est pas là ; et quand la mort est là, c’est nous qui ne sommes plus ».
Suivant ce qu’énonce ce philosophe grec des années 340, l’homme devrait pouvoir vivre sa vie sans se soucier du jour et de l’heure de l’arrivée de la mort. D’autant que tôt ou tard, l’ami passera sans prévenir. Sauf que y arriver n’est en rien une sinécure. Au contraire. Comment réussir à vivre dans une sorte de tranquillité absolue quand on sait, par exemple, que la maladie qui est présente dans l’environnement de l’homme peut être le début de la fin ? comment faire quand monter à cheval, à moto ou à bord d’un avion, un véhicule, un train peut être synonyme de sonner (son) glas ?
N’est-ce pas cet état d’esprit des cognitifs qui font du yoyo que décrit avec justesse et délicatesse le philosophe italien Quintus Ennius quand il affirme que « La mort n’est pas un mal, l’approche de la mort en est un » ? Cette situation est d’autant prégnante que chaque jour, autour de vous, chez vous, vous voyez des gens vous quitter, arrachés par la mort. Le processus d’envoi est si opaque que personne n’en connaît les critères. Riches, pauvres, enfants, insolents, gentils, gentlmen, assassins, dictateurs, terroristes, etc., tous passent à la casserole et indistinctement.
Ce qui en rajoute à l’anxiété humaine et qui fait que même les prêtres et autres pasteurs qui devraient appeler de tous leurs vœux l’ami fidèle, la mort, pour aller tout droit auprès de leur seigneur, éprouvent les mêmes sensations de grande peur que n’importe quel citoyen, quand ils ont le moindre sentiment que la mort viendrait toquer à leur porte. Et dire que cette sensation de la citadelle assiégée gouvernera encore et encore le monde ! La cause est, semble-t-il, dans la tête des humains eux-mêmes qui sont ingrats, inconstants, simulent ce qu’ils ne sont pas et cachent ce qu’ils sont, pour paraphraser l’Italien Nicolas Machiavel.
Ils pourraient vivre encore longtemps cette hantise avec « la présence des absents dans la mémoire des vivants ». Car la mort est justice.
Abdoulaye Villard Sanogo