Illustration d'un goumin sur les réseaux sociaux
Dans une Côte d'Ivoire où les ruptures amoureuses, connues sous le terme "goumin", sont vécues avec intensité, les réseaux sociaux occupent désormais une place centrale. Outils de réconfort ou amplificateur de douleur, ces plateformes permettent à chacun de partager à sa manière les peines de cœur.
Pour explorer ce phénomène, l'équipe de pressecotedivoire.ci est allée à la rencontre des jeunes abidjanais dans plusieurs quartiers pour comprendre comment ils vivent leur "goumin" en ligne.
À Yopougon, l'une des communes les plus peuplées d'Abidjan, les amours naissent et se fanent au rythme effréné des réseaux sociaux. Boris Bayou, habitant du quartier Yopougon Académie, décrit comment les réseaux sont devenus une échappatoire, et parfois même un divertissement. « Les réseaux sociaux nous permettent d'évacuer un peu la douleur, de ne pas y penser tout le temps. Entre les vidéos et les publications, on se moque aussi des autres pour s'amuser. Ici, rire des chagrins d'amour, c'est comme un clin d'œil : tu as du goumin, mais as-tu mangé ce matin ? Pour nous, c'est un moyen de se rappeler que tout peut s'arrêter à tout moment. Sur les réseaux sociaux, tout le monde s'amuse, chacun est dans son giga », explique-t-il en riant.
A Cocody, une commune connue pour son dynamisme et ses jeunes branchés, une autre vision émerge. Astrid, résidente du quartier des Deux Plateaux, partage son avis sur le rôle des réseaux. « Parfois, ça adoucit la peine parce qu'on peut discuter avec d'autres personnes ou voir des publications qui nous changent les idées. Mais si tu tombes sur des postes d'amour où des gens sont en train de montrer leur affection, ça ravive ton "goumin". Tu as l'impression que ces publications te sont destinées, et ça fait mal », confie-t-elle, amusée.
Abobo, dernier arrêt de notre tournée, apporte une perspective encore différente. Dans cette commune réputée pour son esprit débrouillard, Jean-Luc, un jeune entrepreneur, estime que le "goumin" n'est même pas un sujet de préoccupation. « Le "goumin" nous fait rire ici. Sur Facebook, ce sont les " tchepos " (personnes naïves) qui en souffrent. Une fois que tu es concentré sur ton travail, le reste n'a plus d'importance. Moi aussi, une fille m'a déjà fait ça, mais aujourd'hui, je suis sur les réseaux pour faire de l'argent. Le "goumin", c'est dépassé », dit-il fièrement.
Au-delà des rires et des larmes, certains utilisateurs organisent des groupes de soutien pour ceux qui traversent un "goumin". Ces communautés offrent des conseils pour éviter les mêmes erreurs et apporter une écoute bienveillante. Les réseaux sociaux deviennent ainsi un lieu de solidarité, où les jeunes Ivoiriens, entre TikTok et Facebook, préfèrent rire de leurs douleurs que de s'y abandonner.
DK