Le délai de 30 jours fixé aux autorités ivoiriennes pour exécuter l’ordonnance rendue le 22 avril par la Cour Africaine de droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) a expiré le 22 mai à minuit.
Les avocats de Guillaume Soro sont formels, il n’y a aucun début d’exécution de l’ordonnance rendue le 22 avril 2020 par la CADHP. Ce jour-là cette juridiction supranationale a ordonné à l’Etat (de Côte d’Ivoire) défendeur de :
« -surseoir à l’exécution du mandat d’arrêt émis contre Guillaume Soro ;
-surseoir à l’exécution des mandats de dépôt décernés contre les requérants Camara Loukimane, Kanigui Soro, Yao Soumaila, Soumahoro Kando, Kamaraté Souleymane Koné, KaridioulaSouleymane, TehfourKoné, SimonSoro, Porlo Rigobert Soro, FélicienSékongo, Marc Kidou Ouattara, Mamadou Djibo, AboubacarTouré, BabouTraoré, LadjiOuattara, GnamiandN’Drin, DahafoloKoné, Adama Zebret et les mettre en liberté provisoire ».
La décision est insusceptible de recours. Elle doit donc s’exécuter, un point un trait.
Des spécialistes ivoiriens, consultés en son temps par les autorités, ont conseillé une exécution de cette ordonnance. Mieux, ils ont estimé que cette décision de la Cour Africaine pouvait servir de prétexte aux dirigeants ivoiriens pour poser des actes de décrispation de l’atmosphère politique nationale. Pour ces conseillers, la libération des proches de Guillaume Soro et la suspension du mandat d’arrêt émis contre le leader de Générations et Peuples Solidaire (GPS), candidat déclaré à l’élection présidentielle de 2020, pouvait être le premier d’une série de gestes d’apaisement de la part du pouvoir Rhdp. Le plus important à leurs yeux étant de créer un climat favorable à des élections sans violence en octobre 2020.
Le mercredi 29 avril, le conseil des ministres a décidé du retrait de la Côte d’Ivoire de la déclaration de compétence est prévu à l’article 34, alinéa 6 du Protocole de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. Au motif que les agissements de la CADHP« portent atteinte à la souveraineté de la Côte d’Ivoire, à l’autorité et au fonctionnement de la justice et perturbe l’ordre juridique interne des Etats ». Malgré ce retrait qui ne pourrait prendre effet qu’un an plus tard, selon les juristes, et qui n’est pas suspensif des décisions déjà rendues par la Cour africaine concernant la Côte d’Ivoire, l’on a toujours espéré une application de l’ordonnance du 22 avril par Abidjan.
Lorsque le 28 avril, un jugement par contumace est organisé en correctionnel au Plateau, au mépris des injonctions de la CADHP, et que l’ex-président de l’Assemblée nationale a été condamné à 20 de prison ferme, 5 ans de privation de droits civiques…, nous avons continué d’espérer une exécution, au moins partielle, des recommandations de la Cour Africaine, en permettant aux prisonniers proches de l’ex-PAN de recouvrer leur liberté et retrouver leurs familles avant le 22 mai. Hélas, il n’en n’est rien à ce jour. Ce qui n’est pas fait pour désamorcer la tension nationale. Faut-il pour autant perdre tout espoir ? Nous osons continuer de croire que malgré l’expiration du délai qui leur a été imparti par la CADHP, les autorités ivoiriennes se résoudront à saisir la perche que leur tend cette juridiction. Nous osons croire que la Côte d’Ivoire ne s’entêtera pas à défier la Cour de l’Union africaine et par-delà la communauté internationale. Les conseils de Guillaume Soro ont décidé de saisir à nouveau la CADHP, faire constater la non-exécution de son ordonnance du 22 avril et réclamer des sanctions. Nous osons croire que le Président Ouattara et son gouvernement ne s’obstineront pas jusqu’à ce stade. Attendons de voir.
Cissé Sindou