Le professeur Bamba Moriféré, président du Rassemblement du peuple de Côte d’Ivoire (RPCI), parti membre de la Coalition pour la démocratie, la réconciliation et la paix (CDRP) s’est à nouveau prononcé sur l’actualité marquée par l’investiture prochaine d’Alassane Ouattara et le dialogue politique.
Réagissant à l’adresse du président Bédié à la nation, Bamba Moriféré a réaffirmé que seule la résistance peut faire partir Alassane Ouattara du pouvoir.
Après sa réélection, le président Alassane Ouattara va être investi le lundi 14 décembre 2020, votre réaction ?
Pour nous et l’ensemble de l’opposition unie, c’est tout simplement un non évènement. Nous le répétons et le réaffirmons, M. Ouattara est un ancien Président. Ce n’est pas le tapage médiatique qu’il veut organiser qui changera le fait qu’il a opéré un coup d’état en marchant sur le corps de nombreux ivoiriens. Il s’agit ni plus ni moins que d’une auto-proclamation dépourvue de toute légitimité populaire. La véritable élection présidentielle, démocratique, inclusive, concurrentielle, juste et transparente, sera organisée par une transition démocratique qui mettra fin à cette dictature fasciste ubuesque.
Le Président Bédié vient, par une adresse à la Nation, de proposer un dialogue national inclusif, regroupant toutes les forces vives, à l’effet d’organiser les véritables élections. Qu’en pensez-vous ?
La dénomination n’a pas beaucoup d’importance, qu’on l’appelle dialogue National ou transition, cependant, il ne faut pas avoir peur des mots, le contenu est celui d’une transition. Une élection démocratique et inclusive ne peut être organisée de façon unilatérale comme l’a fait Ouattara, elle doit l’être par consensus, donc, dans le cadre d’une transition démocratique, puisque Ouattara qui se sait ultra-minoritaire dans le pays a montré son incapacité à le faire.
Cependant, la véritable question qui se pose ici, c’est de savoir, comment atteindre un tel objectif, face à une dictature qui entend s’installer dans la durée, car il ne faut pas se faire d’illusion sur les objectifs diaboliques de Ouattara de faire définitivement main basse sur notre pays, par la force et par la violence, dans le cadre d’une « présidence à vie ». Cet épisode a commencé avec sa Constitution de 2016, à l’occasion de laquelle, certains de nos partenaires d’aujourd’hui se sont fait berner. Nous n’avons donc plus droit à l’erreur.
Justement, comment donc pensez-vous atteindre l’objectif du dialogue national inclusif, ou de la transition ?
Par la résistance active et la mobilisation populaire, il n’ya pas d’autres choix, en tout cas, dans les circonstances objectives actuelles, Ouattara ne nous laisse pas d’autres choix. Les populations ont montré leur détermination, elles ont déjà payé un lourd tribut par les sacrifices consentis, sacrifices que nous n’avons pas le droit de trahir.
De quoi aurions- nous encore peur à l’heure actuelle ? Que peut faire Ouattara de plus horrible que la décapitation d’un jeune dans la fleur de l’âge, l’emprisonnement arbitraire de plusieurs dizaines de nos compatriotes civils et militaires, parmi lesquels des élus de la nation, malgré leur immunité.
Chacun de nous, devra t-il attendre sagement son tour pour être emprisonné par la dictature ou alors, devrons nous tous ensemble, organiser la mobilisation massive, seule à même d’arrêter la dictature? C’est la seule leçon de l’histoire des peuples qui ont su se dresser et vaincre les dictatures, comme au Mali en 1991, au Burkina, notamment.
J’observe d’ailleurs que dans son adresse à la nation, le président Bédié a caractérisé à juste titre, le régime Ouattra, de dictature. Or, de manière universelle, partout dans le monde et de tout temps, la seule façon de combattre la dictature, c’est la Résistance avec un grand R.
Le Président Bédié a proposé une grande marche à cet effet, qu’en pensez-vous ?
Comme je l’ai déjà expliqué, Ouattra, acculé après sa forfaiture et l’émoi causé au plan international par ses crimes abominables, notamment la décapitation du jeune Toussaint, a tenté de faire diversion en demandant une rencontre sans objet avec le président Bédié, dans le but de casser la désobéissance civile en cours, pour lui permettre de faire son investiture en faisant croire à un apaisement et à un dialogue. Cette fameuse rencontre, je le redis, était inopportune.
Il est donc impérieux pour l’opposition de reprendre la lutte de manière résolue contre la dictature. La proposition d’une grande marche pacifique est donc bien venue.
Nous observons cependant, qu’aucune date n’a été fixée à cet effet, ce qui n’est point de nature à sonner la mobilisation des populations pour la 2e phase de la lutte pour la résistance à la dictature. En tout état de cause, l’opposition unie gagnerait à se réorganiser en conséquence, après toutes les arrestations subies. Une direction de la lutte, ferme, juste, unie et avisée est capitale pour une issue heureuse. Le succès de notre combat est à ce prix.
Le peuple ivoirien nous regarde, nous n’avons plus droit à l’erreur.
Interview réalisée par Lambert KOUAME