Cette fois-ci, ils attendaient quelque chose de meilleur de leurs pachydermes. Ils l’ont eu au bout de trois minutes et quelques secondes. Ces passionnés des Eléphants et du foot ont été délivrés, samedi 13 janvier 2024, au stade d’Ebimpé, par un but « venu de nulle part ». Les pauvres Djurtus, ils ne savent pas que dans une telle position, balle au pied, fonçant comme un bélier de Yamoussoukro, Séko Mohamed Fofana fait toujours du Séko Mohamed Fofana !
Alors que ces passionnés s’attendaient, dès lors, à un festival de buts (certains espéraient une main levée= 5 buts), leur espoir sera contrarié par une solide équipe bissau-guinéenne qui s’est vite ressaisie et qui tenait mieux le ballon que les Ivoiriens. On a pu admirer leurs sorties de balles impeccables même s’il leur manque encore l’essentiel : la finition, le dernier geste qui peut être fatal à l’adversaire.
Dès cet instant, le doute commençait à s’installer dans la tête des passionnés des Eléphants. Surtout qu’en regardant dans le rétroviseur, ils revoient l’image de ces Djurtus, à une coupe d’Afrique, revenant au score vers la fin du match après avoir été menés au score durant près de 90 minutes. Ce doute grandira quand, sur deux ou trois attaques placées, les visiteurs parviendront à inquiéter sérieusement la défense ivoirienne.
Puis est arrivé l’inattendu des pieds d’un joueur qui, pour lourdeur et paresse remarquables, était appelé à faire valoir ses droits sur le banc la minute qui devrait suivre, dès la sortie de balle. Jean-Philippe Krasso a sauvé son match en même temps qu’il a fait balancer le cœur des passionnés d’un gros doute à une grosse espérance. Désormais, ils voient grand et loin espérant que les Eléphants suivront leur regard.
Ce match des Eléphants remet au goût du jour, l’éternel débat sur le foot entre deux grandes tendances. Premièrement, les puristes pour qui le foot est un jeu qui procure du plaisir aussi bien aux acteurs qu’aux spectateurs. Ce qui sous-entend que l’acteur doit être inventif, faire du spectacle afin de créer de l’émotion. Deuxièmement, les « pratiques ». Eux ne sont intéressés que par le résultat final. C’est-à-dire la victoire. Avec eux, peu importe la manière tant que la victoire est au bout des 90 minutes.
Même s’ils ont marqué deux splendides buts, les Eléphants n’ont pas convaincu les « connaisseurs » du foot. Face à une équipe que l’on dit modeste, la défense n’a pas montré une réelle solidité, le milieu était parfois absent et l’attaque a ressemblé quelquefois à un mollusque désespéré. De sorte que l’on se demande ce que l’équipe de Gasset serait devant un groupe avec un cran au-dessus des Djurtus. La réponse se trouve peut-être dans cette réflexion bien connue en sport et qui affirme que chaque match est une réalité et a sa propre réalité.
Nigeria-Côte d’Ivoire arrive justement dès jeudi pour départager puristes et « pratiques ». Sûr que les seconds prendront le dessus puisque dans l’histoire du football ivoirien, des cas pratiques nous viennent en souvenir. Les Eléphants de Robert Nouzaret pratiquaient un football alléchant avec des attaques bien placées suivies de renversement de jeu et qui se terminaient par des frappes. Mais ils ont été éliminés en demi-finales. Que dire alors des Eléphants du coach polonais Henryk Wojciech Kasperczak ? Un football chatoyant, des plus mémorables qui n’a malheureusement pas pu apporter le grand sourire aux Ivoiriens. Par contre, Paul Martial Yéo, dont le système de jeu était baptisé « dèmin-dèmin », c’est-à-dire à la débrouille, a remporté le graal.
Dans une compétition comme la CAN, le plus important pour un coach, c’est d’allier bonne défense pour ne pas prendre de but à bonne relance et adresse devant les buts adverses. Mais pour y arriver, il faut courir beaucoup et être là pour les deuxièmes balles, qu’elles soient dans son propre camp ou dans l’autre partie du terrain. Par ailleurs, de nombreux coaches préfèrent entamer la compétition mollo-mollo pour espérer arriver au moment voulu. Est-ce la stratégie du coach ivoirien ? Espérons-le. De toutes les façons, quand il n’y a plus d’espoir, disent les sages, reste l’espérance.
Abdoulaye Villard Sanogo