Au-delà des performances sportives, il est opportun de s’interroger à nouveau sur l’environnement qui prévaut actuellement entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso. Si l’on s’en tient à la posture des dirigeants actuels du Burkina Faso, la Côte d’Ivoire est considérée comme une base arrière pour la déstabilisation de ce pays frère. Incapable de faire face au péril djihadiste et vautré dans l’autocélébration, le capitaine Ibrahim Traoré et la soldatesque au pouvoir ont placé la Côte d’Ivoire dans leur ligne de mire avec un narratif complotiste qui porterait à croire que ce pays et ses dirigeants soutiennent et financent des opposants et des terroristes pour attaquer le Burkina Faso. Les deux matchs des Etalons qui viennent de se dérouler sur les bords de la lagune Ebrié, rabattent le caquet aux putschistes burkinabé.
Comme cela est de coutume, le premier citoyen qui va féliciter les Etalons pour leur qualification, sera immanquablement le capitaine Ibrahim Traoré. S’il a une once de lucidité, il saura que c’est le pays qu’il accuse de vouloir attenter à l’intégrité du Burkina qui vient d’offrir ses infrastructures et un environnement qui ont été le levain de cette qualification. Sur cette base, l’on peut légitiment s’interroger sur les accusations des putschistes burkinabè contre la Côte d’Ivoire. Comment un pays qui abrite sur son sol et prend en charge des dizaines de milliers de réfugiés burkinabé peut-il décider de financer et monter des groupes terroristes pour attaquer le Burkina ? Comment un pays comme la Côte d’Ivoire qui investit lourdement dans la lutte contre le terrorisme peut-il recourir aux mêmes terroristes pour attaquer un pays frontalier comme le Burkina ? Sachant que la première destination des réfugiés ou demandeurs d’asile burkinabé en cas d’attaque ou d’instabilité chronique sera la Côte d’Ivoire, comment un tel pays peut se payer un luxe irresponsable d’attaquer le Burkina dans de telles conditions ? Voici autant de questions qui achèvent de convaincre que les accusations du capitaine Ibrahim Traoré et de ses frères d’arme relèvent de la pure paranoïa.
Et les deux matchs que l’équipe nationale du Burkina Faso vient de disputer en Côte d’Ivoire sont la preuve manifeste de ce que les putschistes burkinabè sont dans un populisme improductif. Que ce soit au stade Alassane Ouattara d’Ebimpé jeudi dernier ou au Stade Félix Houphouët-Boigny ce dimanche
13 octobre 2024, ce sont des dizaines de milliers de ressortissants burkinabè qui sont allés au terrain pour pousser à la victoire leur équipe nationale. Mieux, des Ivoiriens dans le maillot des Eléphants sont allés soutenir les supporters burkinabè à mieux supporter leur équipe nationale. Voici la réalité que vivent les peuples ivoiriens et burkinabè que seuls Ibrahim Traoré et sa soldatesque ne voient pas. A la fin du deuxième match des Etalons contre le Burundi, signe de leur qualification, les supporters burkinabè sont descendus sur la pelouse pour manifester leur joie, comme s’ils étaient au Stade du 4 août de Ouagadougou. Mieux encore, chaque fois qu’un joueur burkinabé scorait, le buteur et ses coéquipiers se retrouvent devant leur public pour effectuer le salut militaire. Et tout ceci se passe en Côte d’Ivoire, le pays qu’Ibrahim Traoré accuse de vouloir déstabiliser le Burkina Faso.
A ce niveau de responsabilité, le jeune capitaine putschiste ne peut pas avoir l’excuse de la jeunesse et de la fougue militaire et populiste. Ce qui existe entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso est trop grand et trop profond au point où deux peuples unis par l’histoire et la géographie ne vont pas se laisser prendre au piège des hérésies d’un régime putschiste en perte de vitesse dans la guerre contre le terrorisme. De retour à Ouagadougou après leur match spectaculaire jeudi au Stade d’Ebimpé et leur brillante qualification ce dimanche au Félicia, le sélectionneur Brama Traoré, le capitaine Bertrand Traoré et ses coéquipiers Dango Ouattara, Edmond Tapsoba et autres Blati Touré, diront au capitaine Ibrahim Traoré ce qu’ils ont vu et vécu en Côte d’Ivoire. Ils lui diront qu’ils ont fait le salut militaire au stade qui porte le nom d’Alassane Ouattara et rien ne leur est arrivé. Ainsi donc, si le capitaine Ibrahim Traoré doit chercher des déstabilisateurs du Burkina, qu’il parte les chercher ailleurs. La Côte d’Ivoire qui vient d’offrir ses installations et un environnement propices pour la qualification historique du Burkina Faso à la CAN 2025 n’a pas cette culture et cette éducation.
Bernard KRA