Mais qui va défendre les intérêts matériels et moraux des élèves et étudiants ?





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Les étudiants et étudiants de Côte d'Ivoire sont sans défense depuis le 17 octobre 2024, date de la proclamation par le Conseil national de sécurité (CNS), de la dissolution de « toutes les associations syndicales estudiantines », la Fesci et comprenant. Cette proclamation a été suivie le 31 octobre d'un décret pris en conseil des ministres qui a entériné la dissolution des associations à caractère syndical.

Depuis, c'est le calme plat. En dehors, bien sûr, d'un appel lancé le même 31 octobre par un certain « général Crapaud le noir » qui entend mobiliser ses camarades pour aller contre ce qu'il appelle les dissolutions dictatoriales. Il disait lancer ce cri du cœur au nom du bureau exécutif national de la Fesci. Cet appel depuis la clandestinité a obligé le bureau des anciens de la Fesci à produire un communiqué dans lequel Jean Martial Ahipeaud et ses camarades demandent expressément à leurs « jeunes frères » de faire profil bas et d'attendre la fin des enquêtes du procureur de la République. Ils appellent en outre les Fescistes à se mobiliser plutôt pour le procès qui suivra le travail du procureur.

En attendant la fin de l'enquête judiciaire et le procès qu'elle induira, les élèves et étudiants de Côte d'Ivoire sont pieds et mains liés et bouches cousues. Ils sont appelés désormais à regarder sans mot dire encore moins à revendiquer un quelconque droit. D'ailleurs, le communiqué du gouvernement annonçant la mise en coupe réglée de la vie associative sur les campus universitaires est clair et pointe du doigt les associations à caractère syndical. C'est-à-dire, toutes les associations nées pour défendre les intérêts matériels et moraux des élèves et étudiants n'ont plus le permis de manifester ou de revendiquer.

On se demande bien comment cela fonctionnera puisque, comme le reconnaît l'exécutif, la législation en vigueur relative à la vie associative est très flexible et permet aux associations de se créer librement sans autorisation préalable. Dans la pure logique, en dissolvant les syndicats d'étudiants, le gouvernement exprime clairement sa pensée. Il ne veut plus de mouvements associatifs sur les campus universitaires et il est prêt à tout mettre en œuvre pour que cela soit ainsi. Ce qui veut dire que même si, au nom de la loi sur les associations, de nouvelles associations d'élèves et étudiants ultérieurement à se créer, il ne les reconnaîtrait pas.

Autrement dit, il n'aurait pas pris le décret de dissolution de toutes les associations à caractère syndical sur les campus universitaires. Il se serait tout juste contenté d'attendre les résultats de l'enquête du procureur de la République, faire le procès et de faire subir la rigueur de la loi aux fautifs, rien qu'aux fautifs, au lieu de choisir de mettre toutes les associations d'étudiants dans le même sac de l'indignité.

Le gouvernement ne devrait pas violer la loi pour punir un ou des indélicats. La meilleure gestion de ce dossier c'est la sanction à appliquer indistinctement aux hors-la-loi. Toutes les autres voies (de fait) vont peut-être et dans un premier temps ramener un certain calme sur les campus mais ce calme ne pourra être pour longtemps. Car les élèves et étudiants ne pourront, sans broncher, regarder aussi longtemps que le voudra l'exécutif, la violation de leurs droits et le bafouement de leurs intérêts matériels et moraux.

Retenons-le une fois pour toutes. Il n'est pas possible et il n'est pas bon pour notre pays d'avoir des universités et des campus universitaires sans associations syndicales dont le mais ultime est de veiller à la protection des droits et devoirs de leurs membres. Il vaut mieux sensibiliser les étudiants au respect de leurs devoirs et de la sacralité de la vie humaine en laissant planer sur leurs têtes le glaive du châtiment plutôt que de faire le choix de l'enfermement.

Contraindre les élèves et étudiants à la clandestinité est le meilleur cadeau qu'on leur fera pour cette fin d'année. Ils savent parfaitement ce que nous savons. Dans l'histoire des luttes, même les esclaves à qui l'on dénie tout droit y compris l'accès à l'eau, finissent par s'organiser afin d'arriver à briser les chaînes. Et le jour où ils sortent la tête de l'eau, c'est exactement comme un fleuve étouffé qui sort de son lit. Inarrêtable !

Abdoulaye Villard Sanogo

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